LES CANAUX DU RHONE ET LES IRRIGATIONS.

 

> I - André Laget, historien de Rochefort.

> II - Canaux et irrigations

> III - Le canal Philippe Lamour

> IV - Le projet d'aqueduc reliant Montpellier à Barcelone

> V - Le projet DUMONT en 1881, enquête dans le département du Gard

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I - André Laget, historien de Rochefort.

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Quand l’instituteur public, André Laget, édite en 1909, sa monographie d’une commune rurale, Rochefort du Gard, il émet un vœu pieux, la réalisation du projet des Canaux du Rhône, voici un extrait de son livre:

 

«Aussi, la fertilité du sol serait-elle considérablement accrue si les pouvoirs publics faisaient passer dans le domaine de la réalité l’un quelconque des projets de canal latéral au Rhône; projets qui tous comprennent dans leur tracé le territoire de la Commune. Il n’y aurait plus alors de sécheresse à craindre, et on ne verrait plus se renouveler des années de pénuries, comme celle de 1906.»

 

En effet cette année là, le projet des canaux du Rhône véritable Arlésienne et remis sur les rails, mauvais jeu de mots si on connaît un tant soit peux la chronologie de ces évènements:

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II - Canaux et irrigations

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Présentation locale du projet d’irrigation.

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Au niveau local les surfaces à irriguer étaient groupées en 31 Syndicats

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Syndicats du bas service

1) Tain - Valence

2 Loriol Montélimar

3) Saint-Paul-Trois-Châteaux

4) Orange

5) Bourg-Saint-Andéol

6) Pont-Saint-Esprit, Saint Marcel, Saint Just, Saint Paulet, Saint Julien.

7) Bagnols, Codolet, Saint Etienne, Chusclan, Vénéjean, Orsan, Connaux, Saint Alexandre, Saint Gervais, St Michel d’Euzet, Tresque, St Laurent.

8) Roquemaure, Lirac, St Geniès, Montfaucon, Sauveterre, Tavel, Rochefort.

9) Remoulins, Castillon-du-Gard, Saint-Hilaire-d’Ozilhan, Théziers, Comps.

10) Uzès, Saint-Maximin, Sanilhac, Blauzac.

11) Saint-Chaptes, Moussac, Boucoiran, Dions, Gajan.

12) Nîmes, Redessan, Bezouce, St-Gervasy, Bellegarde, Uchaud, Vauvert, Beauvoisin, Générac, Manduel.

13) Aiguesmortes, Saint-Gilles, Aimargues.

14) Clarensac, Caveirac, Langlade, Boissieres, Vergèze, Codognan, Congénies.

15 Sommières, Salinelles, etc...

16) Quissac, Saint Clément, etc...

17) Lunel, Marsillargues, Lunel Viel, Saint Christol, etc...

18) Castries.

19) Maugio.

20)Montpellier.

21) Cette, Frontignan.

22) Florensac.

23) Pézenas.

24 Béziers

25) Narbonne.

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Syndicats du haut service.

26) Lauriol, Sauzet.

27) Saint-Paul-les-Trois-Châteaux.

28) Orange.

29) Uzès, Vers, Argillers, Saint-Quentin, Montaren, Saint-Maximin, Arpaillargues, Blauzac, Bourdic, Aigaliers, Euzet, Moussac.

30) Alais, Saint-Christol-les-Alès, Anduze, Tornac, Marsillargues-Atuech, Lézan, Cardet, Massannes, Cassagnoles, Ners, Maruéjols et le rayon compris entre Canaules, Quissac, Montmirat et Combas.

31) Garons.

 

Surface irrigable rive gauche :

 

Bas-fond de Pujaut

Roquemaure

Tresque - l’Ardoise

Montfaucon

Saint-Chaptes

Remoulins - Aramon

Meynes

Camargues

2900 h

1800 h

4600 h

900 h

3000 h

3200 h

1500 h

50000 h

 

Conférence à Nîmes le 8 juillet 1909.

Cette année là, le jeudi 8 juillet 1909 a eu lieu, au grand théâtre de Nîmes, sous la présidence de M. le maire de cette ville, une conférence sur les canaux du Rhône, organisée par le syndicat de la presse du midi. Cette conférence a été faite par M. Maurice Long, membre du Conseil général de la Drôme, et M. Long a exposé, avec une véritable éloquence, l’historique de la question, et montré combien peuvent être facilement vaincus les obstacles de toutes sorte qui s’opposent à l’exécution des canaux du Rhône. Il dit que la construction des canaux exigera une dépense de 205 millions. Une Société financière sérieuse offre d’exécuter l’œuvre en six ans, aux conditions suivantes: Elle apporte quarante millions qui devront être consacrés à la construction de canaux secondaires, et réclame de l’État une annuité de sept millions pendant 50 ans. Elle partagera, pendant cette période, les revenus du canal avec l’État, ensuite, elle n’aura plus de droit sur le canal.

 

Le conférencier s’applique à démontrer que c’est là une bonne affaire pour l’État qui, outre les revenus annuels, bénéficiera, sous forme de droits d’enregistrement, de la plus-value qu’acquerra le sol arrosé. M. Long termine son magnifique exposé en engageant les agriculteurs à ne pas se désintéresser des canaux du Rhône. On peut aboutir si on veut, dit-il, le moment est des plus favorable.

 

On n’a qu’à rappeler que c’est en 1879 que la loi déclarant les canaux du Rhône d’utilité publique a été votée, et demander l’application de la loi d’exécution desdits canaux votée par la chambre en 1881.

 

M. de Bernis, député, prend ensuite la parole pour affirmer que le concours de tous les représentants de la région est acquis à l’œuvre. M. le maire remercie ensuite le conférencier et propose à l’assemblée, composée de 5 à 600 personnes...

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Gaston Doumergue.

En 1907, un journaliste, rédacteur à la Dépêche de Toulouse, dédie une Etude sur les canaux du Rhône à Gaston Doumergue, alors Ministre du Commerce et de l’industrie, pour les lecteurs qui ne connaissent pas ce grand homme politique originaire du Gard voici sa biographie:

 

«Languedocien, fils de vigneron, Gaston Doumergue poursuit une carrière dans la magistrature lorsque le siège de député du Gard devient vacant. Brillamment élu au Palais Bourbon, il y siège pendant dix-sept ans dans les rangs du groupe radical-socialiste et y défend avec ardeur ses convictions républicaines et laïques. En 1910, il passe au Sénat.

 

Plusieurs fois ministre, Doumergue est sollicité par Poincaré en 1913 et devient président du Conseil. Mais son cabinet, affaibli par une situation internationale difficile et par le scandale qui touche l’épouse de son ministre des Finances, Joseph Caillaux, tombe en 1914. Ministre des Colonies de Briand jusqu’en 1917, Doumergue reprend, après la chute du cabinet Briand, son activité au Sénat où il devient président du groupe de la gauche démocratique.

 

En février 1923, il remplace Léon Bourgeois à la présidence de la Haute Assemblée. L’année suivante, il se présente à la magistrature suprême et l’emporte devant Paul Painlevé. Son septennat de Président de la République, sera marqué par une forte instabilité ministérielle, ce qui ne l’empêche pas de devenir une figure populaire, affectueusement surnommée «Gastounet». Retiré en Haute-Garonne à la fin de son septennat, il est rappelé à Paris en 1934 par Paul Doumer, qui voit en lui un homme “au-dessus des partis” capable de ramener le calme dans le pays après le choc des émeutes du 6 février.

 

Président du Conseil, Doumergue constitue un cabinet de rassemblement et instaure avec les Français un dialogue direct et rassurant, en inaugurant une forme encore peu usitée de communication politique : La «causerie radiophonique au coin du feu». Son ministère dure jusqu’en novembre, date à laquelle il démissionne, sur une divergence de ses ministres radicaux. Il meurt en 1937, dans sa maison d’Aigues-Vives.»

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Gaston Doumergue, l'homme du compromis.

Homme de pouvoir pendant plusieurs décennies, on peut s’étonner du manque «d’intérêt» que ce dernier a pu apporter au Languedoc, sa région. Ce brave homme débonnaire surnommé «Gastounet», est animé par le désir d’être populaire. Les chantiers prévus étaient considérables et «son sens aigu du compromis» a ruiné tout travail de fond efficace.

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Extraits de l’étude de Marius Richard du 2 avril 1907.

(remise à Gaston Doumergue)

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Historique.

 

En 1718, un projet relatif à la navigation du Rhône par le creusement d’un canal latéral devant aboutir à l’étang de Berre est présenté au Conseil d’État du Roi.

 

En 1780 - 1801 - 1806 - 1834

Nota GM : Dans cette étude, Marius Richard, oublie la construction du Canal de Beaucaire à Aigues-Mortes, sa construction perturbée par la révolution et les guerres Napoléonienne sera terminée en 1834, c'est un grand succès pour pour Paulin Talabot, le dernier ingénieur de ce projet.

 

En 1808, M. Céard, ingénieur en chef des Ponts-et-Chaussées présente un projet pour la construction d’un canal latéral au Rhône entre Tarascon et Lyon, devant entraîner une dépense de 46 millions.

 

En 1822, M. Cavenne, ingénieur à Lyon, étudie un canal sur la rive gauche du Rhône, de Lyon à Port-de-Bouc, soit un parcours de 318 kilomètres. Ce projet évaluait la dépense à 47 millions.

 

En 1826, ce dernier projet, qui avait bénéficié d’un avis favorable, tant de la Commission des Canaux que du Conseil général des Ponts-et-Chaussées et du Génie militaire, était approuvé par le gouvernement. Puis on n’en entendit plus parler.

 

De 1831 à 1859, une somme de 25 millions est dépensée à divers travaux sur le Rhône, digues et amélioration du lit du Rhône.

 

En 1860, un programme est établi qui a pour but de creuser dans le lit même du Rhône, un chenal navigable. La dépense totale était évaluée à 51 millions 500 000 francs.

 

Les travaux commencèrent aussitôt.

 

Ainsi, au cours du siècle dernier, on a consacré cent millions à divers travaux d’aménagement du Rhône. Hélas! Le résultat ne fut guère brillant. Sans se laisser aller à un jeu de mots trop facile on peut dire que cent millions ont été jetés à l’eau.

 

En 1873, M. Krantz présente un projet. Il consistait dans l’établissement du canal sur la rive droite et prévoyait une dépense de 100 millions.

 

En 1877, projet Dumont, comportant une dépense de 147 millions pour un canal d’irrigation et de navigation: Irrigation des deux rives jusqu’à Cette et Narbonne sur la rive droite et navigation sur la rive gauche de Lyon à Arles. Une loi du 20 décembre 1879 sanctionna ce projet d’utilité publique.

 

En 1881, l’inspecteur principal Chambrelent révise le projet Dumont, le 27 janvier 1881, le conseil général des Ponts-et-Chaussées proposait deux canaux distincts. Le premier sur la rive gauche, de Condrieu à Sérignan. Le deuxième sur la rive droite de Cornas à Béziers, plus un canal annexe dérivé de la Cèze..

 

Ce dernier projet fut présenté à la chambre le 7 avril 1881 par M. Sadi-Carnot, ministre des Travaux Publics. Il fut ensuite porté au Sénat qui, l’année suivante, le renvoya au Gouvernement pour supplément d’instruction, sur la proposition de M. Krantz. Le Ministère de l’Agriculture fit procéder à de nouvelles études qui eurent pour résultat la préparation de deux nouveaux projets de loi lesquels n’ont jamais vu le jour.

 

En 1882, M. Leger présente un projet économique des canaux dérivés du Rhône, mais l’ingénieur en Chef Flamant enterrait le projet.

 

En 1886, MM. Pavin de Lafarge et Duparchy, présentent une concession pour la construction des canaux. Ces propositions obtinrent l’avis favorable d’une commission présidée par M. Magnin et nommée par le Ministre de l’Agriculture, mais ce fut tout... On n’en entendit plus parler.

 

En 1897 ce projet est repris, par Duparchy qui cette fois s’est adjoint de MM. Claret et Dolfus. On demande à l’Etat 205 millions pour la construction à forfait des canaux. Cette proposition non plus n’a eu aucune suite.

 

En 1898, M. Souleyre, ingénieur des Ponts-et-Chaussées présente au Ministre des Travaux Publics, un projet dont il publie les grandes lignes dans la Revue Scientifique. Il tend à l’aménagement du fleuve par de longs biefs de dérivation, alternant avec des barrages mobiles, dans la partie de la vallée la plus resserrée. M. Souleyre, qui parait avoir surtout en vue l’utilisation des forces motrices, prévoyait une dépense de 300 à 400 millions.

 

A la même époque, MM Perre, ingénieurs, à Avignon, formulent à leur tour leurs propositions. Celles-ci tendaient à la construction d’une série de barrages mobiles, et éclusés, d’Arles à Lyon.

 

Le devis des dépenses était de 300 millions. On prévoyait l’irrigation d’une surface de 250 000 hectares..

 

En 1901, la Commission interdépartementale reçoit communication d’un projet de M. Herrisson, beau de Charles Favre de Thierrens, grande famille nîmoise.

 

Et en 1906, le projet de M. Denèfle, très complet, de plus il préconise des moyens financiers originaux

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Intéressantes considérations Générales.

 

Nécessité des Canaux au point de vue Agricole.

 

Le canal latéral au Rhône est indispensable à l’Agriculture de la région à cause de la latitude qu’il procurera aux populations de la basse vallée d’utiliser pour les irrigations une partie de l’eau, aujourd’hui entièrement absorbée par les services de navigation.

 

Dans le Midi, tout le monde est fixé sur ce point, l’amenée de l’eau pour les irrigations est une question de vie ou de mort pour la végétation...

 

Problèmes de la Navigation.

 

Si la France avait creusé un réseau de voies navigables du Rhône à la mer, on peut affirmer que non-seulement le Midi n’eut pas connu les crises qui en ces dernières années ont amoncelé tant de ruines et tant de misères, mais il aurait vu sur son sol, aujourd’hui rongé par l’hypothèque, se développer magnifiquement les entreprises industrielles et commerciales.

 

La prospérité et la richesse d’un pays dépendent aujourd’hui des moyens de communication, des tarifs de transport. Car il ne suffit pas de produire, il faut pouvoir écouler les produits dans des conditions avantageuses. Cela on ne l’a pas compris en France où le commerce, l’industrie, l’agriculture ont été livrés pieds et poings liés, aux tarifs exorbitants des Compagnies de Chemin de Fer.

 

«Par voie d’eau la tonne de vin de Cette ou Saint-Gilles ou Beaucaire, à Nancy, par exemple, coûterait 9 à 10 francs de transport. Actuellement elle coûte de 55 à 60 francs, par chemin de fer.»

 

Il est un fait incontestable et que l’expérience confirme malheureusement toutes les années à la même époque, c’est que malgré tout son bon vouloir, la Compagnie des Chemins de Fer P.L.M. est incapable, au moment des vendanges, par exemple, d’assurer le transport des marchandises avec la célérité désirable. Les marchandises continuent à s’accumuler dans les gares et se détériorent...

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Pourquoi n’a-t-on pas fait les Canaux

 

Un véritable monopole de fait.

 

L’unique compagnie de navigation Hâvre-Paris-Lyon-Marseille a plus le souci d’une exploitation fructueuse plutôt qu’un développement des transports sur le Rhône dans l’intérêt général

 

L’Administration hostile.

 

C’est l’hostilité, sourde, sournoise, inavouée, du corps des Ingénieurs des Ponts-et-Chaussées. Nous nous garderons de faire le procès de cette administration, mais quand on étudie sans parti-pris la question, quand on se rend compte, d’un côté des efforts incalculables fait en faveur des canaux pendant vingt ans, et d’autre part, de l’attitude de l’administration des Ponts-et-Chaussées arrivant à annihilier ces efforts, on se sent, malgré soi, pris d’un sentiment de méfiance.

 

Il faut voir comment les «Princes» de l’administration agissaient vis à-vis des projets divers.

 

Tous ces projets leurs étaient soumis. Ils ne résistaient guère à la critique des savants officiels. C’est en vain qu’ils se présentaient avec l’apparence la plus solide et que leurs auteurs offraient toutes les garanties de compétence, de savoir et de probité scientifique. Les inspecteurs généraux et les ingénieurs en chef avaient tôt fait de démontrer que le projet était irréalisable. Ils y mettaient une sorte de coquetterie de savants supérieurs qui analysent sans parti-pris, et qui démolissent par devoir...

 

L’opposition des Chemins de fer.

 

Il y a eu l’opposition, se traduisant de manières diverses, des Compagnies de chemin de fer ou de leurs partisans. Car les Compagnies de transport par terre, sont violemment hostiles à la navigation. C’est naturel, dira-t-on. Peut-être. En tout cas ce n’est pas justifié.

 

La dépense.

 

Il y a aussi la question de la dépense. Et ce n’est pas une des moindres. Sur ce point nous nous bornons à reproduire un passage du rapport présenté à la Chambre des Députés par M. M. P. Faure, au nom de la Commission chargée d’examiner ce projet de loi tendant à compléter l’outillage national par l’exécution d’un certain nombre de voies navigables...

 

«Il n’est pas douteux que le coût du canal ne soit très élevé. Mais la question qui se pose est surtout celle de savoir si les résultats économiques seront en rapport avec les sommes engagée...»

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Marius Richard, le 2 avril 1907.

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III - Le canal Philippe Lamour

Vision critique du CANARD ENCHAINE n°4049 du 03/06/98 (page 4)

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Bouygues a posé sa patte sur le Languedoc-Roussillon.

Barrages, centrales électriques, canaux, stations d'épuration et de pompage : tout pour le bonheur du bétonneur.

 

Méchamment critiqué pour ses petits arrangements avec le Front national, l'UDF Jacques Blanc, président de la Région Languedoc-Roussillon, a remis le 20 mai sa démission. Pas de son fauteuil régional, mais de la compagnie Bas-Rhône-Languedoc (BRL), le plus important organisme d'aménagement de la Région.

 

La démarche de Jacques Blanc n'est ni politique ni (on s'en doute) éthique. Sa démission est liée à la gestion, très contestée, de cette compagnie BRL, qui fait l'objet, depuis la fin de l'année dernière d'une enquête préliminaire ouverte par le parquet de Nîmes. Principale bizarrerie: la BRL, à la vocation de service public, est en voie de privatisation rampante au profit, principalement, d'une filiale de Bouygues, la Saur.

 

Une évolution qui s'est peut-être faite au détriment des contribuables languedociens. C'est le soupçon des enquêteurs depuis la saisie de quelques documents lors de la perquisition de BRL, à Nîmes, en décembre dernier.

 

Fondée en 1955 par Philippe Lamour, célèbre artisan, après guerre, de l'aménagement du sud de la France, la compagnie Bas-Rhône-Languedoc a assuré, entre autres, l'investissement de centaines de millions de francs dans l'irrigation, la construction de barrages et de centrales hydroélectriques. Mais, plutôt mal gérée, la compagnie accusait un endettement de 440 millions en 1992. Et, de 1988 à 1992, elle a enregistré 130 autres millions de pertes...

 

Sous l'impulsion de Jacques Blanc, quelques sauveteurs sont alors entrés dans le capital. Parmi ceux-ci la Saur, filiale de Bouygues et troisième distributeur d'eau en France. En 1993, la Saur s'est offert 40 % de BRL-Exploitation, la principale branche de la compagnie, qui encaisse notamment les factures d'eau de 10 000 entreprises ou exploitations agricoles, et de 50 000 foyers.

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Une gestion Blanc-Blanc ?

Episode moins connu: la Saur a aussi mis la main sur l'exploitation d'infrastructures pilotées par BRL: 6 barrages, 4 centrales hydroélectriques, 6 usines d'épuration, 125 stations de pompage et plus de 100 kilomètres de canaux. Enfin, cette filiale de Bouygues a également jeté son dévolu sur de futurs gros contrats d'aménagement liés aux métiers de l'eau et de la construction. Exemple, un gigantesque projet d'aqueduc reliant Montpellier à Barcelone. Mais Jordi Pujol, patron de la région catalane, anti-franquiste notoire, rechignait à négocier avec un Jacques Blanc. Du coup, le départ de cet allié des lepénistes devrait accélérer l'opération.

 

Question: la Saur actionnaire de BRL ne sera-t-elle pas tentée de favoriser la Saur marchand d'eau ? Ou de jouer pour son tuteur Bouygues, roi du béton et de la construction routière ?

 

Apparemment, ces points d'interrogation n'ont guère tourmenté les élus, administrateurs de BRL, pas plus que le préfet de Région de l'époque. En 1995, deux ans après être devenue actionnaire, c'est fort tranquillement que la Saur a achevé de prendre le contrôle total de BRL-Exploitation. En faisant artificiellement baisser l'action de la société BRL-Exploitation de 100 F à 10 F.

 

Cette fois encore, les élus-administrateurs n'ont pas bronché. Au point que, en janvier 1997, le pédégé de BRL-Exploitation, Jean-Louis Blanc, bras droit de Jacques Blanc (mais sans lien de parenté), s'est fait embaucher par la Saur, qui lui a offert le poste de directeur général adjoint du groupe. Hélas !, l'information s'est ébruitée et cette offre de Bouygues, qui pouvait passer pour un renvoi d'ascenseur, a été annulée.

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Les marchands d'eau ne savent pas toujours protéger leurs sources.

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Jérôme Canard

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. IV - Le projet d'aqueduc reliant Montpellier à Barcelone

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Quand est-il au juste? Il s’agit de prélever une très importante quantité d’eau du Rhône non utilisée par manque d’imagination et incompétence de nos décideurs, pour la donner à nos concurrents qui eux en connaissent la juste valeur. Au cours de ces prochaines années l’enjeu de l’eau douce deviendra primordial, pas de développement, pas de progrès sans cette matière première.

 

Nos décideurs politiques et financiers le prennent à la légère, avec un tel contrat, ils s’engagent en hypothéquant notre patrimoine.

 

Dans cet échange le Languedoc est blousé, nous avons l’eau, ils ont le soleil, nous leur donnons l’eau, ils nous donnent... Le droit d’aller travailler à Barcelone pour nos enfants! ! !

 

Avec l’arrivée du TGV à Barcelone, cette région sera transformée en Paradis exotique grâce à l’eau, son pouvoir d’attraction pour les pays du nord de l’Europe sera décuplé. Et le Languedoc meurtri par les saignés créées par les voies de circulation, ne pourra que regarder passer ces touristes qui iront dépenser leurs Euros en Catalogne.

 

Les Catalans d’origine n’en seront pas plus heureux. Le roi du béton arrive avec l’eau. «voir article ci-dessus» Il est prêt à distribuer le progrès et la modernité dans cette région encore disponible.

 

Des travailleurs plus coopératifs et moins onéreux seront les biens venus sur les immenses chantiers, ils serviront de réservoir de main d’œuvre et permettront de limiter l’augmentation du coût de cette dernière. Seule la spéculation sur les terrains et les loyers sera profitable aux propriétaires. (anciens et nouveaux, voir paragraphe ci-dessous)

 

Après le grand boum, les Catalans vont se réveiller avec la gueule de bois, ils ne reconnaîtront plus leur pays et ils ne seront plus chez eux. Une grande partie de la main d’œuvre venue pour la circonstance restera. La masse des emplois créés sera saisonnière «tourisme et agriculture» la qualité de vie sera évaporée et noyée dans le béton.

 

Des renseignements donnés par une source bien informée, nous dévoilent une partie cachée de ces enjeux. De grands responsables du projet achètent des domaines dans la région qui sera desservie par le canal. Bonne opération pour ces derniers ils achètent à bas prix des terrains aux Catalans, et feront la triple culbute en quelques années.

 

 

Article de Georges Mathon, Nîmes le 11 mai 2002.

> En savoir plus sur le projet Montpellier/Barcelone, côté Espagnol 

 

Série d'articles sur les projets de canaux et d'irrigation dans le Gard
> Projet de rendre le Vistre navigable en 1696
> Les eaux du Rhône à Nîmes projet de 1868 à 1871
> Le Projet Dumont en 1881
> Etude des projets des Canaux Dérivés du Rhône par Emile Jamais en 1883
> Les eaux du Rhône à Nîmes projet de 1913
> Les Canaux du Rhône, un rendez-vous manqué



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