Les Sept Collines de Nîmes

par M. IGOLEN, 1935.

 

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...Nous connaissons très exactement la ligne des remparts romains ; elle affectait la forme d'un vaste éventail, dont les Arènes constituaient le clou gigantesque...

 

 

Avant-Propos.

 

L'origine de Nimes remonte à la plus haute antiquité et sa raison d'être fut sans doute la source abondante qui sort de terre au pied de la colline de la Tour Magne.

 

Avant l'époque romaine, alors que Nimes était la capitale arécomiques, il y a tout lieu de croire que la cité occupait les pentes des collines de la Tour Magne et de Montaury, les bords du Cadereau et, plus a. l'est, en dehors des marécages formés par les eaux de la source qui, non retenues divaguaient dans la plaine, les environs de la cathédrale actuelle où se trouvait un vieux marché celtique.

 

Au cours du premier siècle avant notre ère, lors de la conquête de la Narbonnaise, Nîmes se transforma et devint une grande ville après qu'Auguste l'eut élevée au rang de colonie et lui eut donné des portes et des murs. C'est à l'intérieur de ces remparts, s'étendant sur les collines environnantes et tout au loin dans la plaine, que la nouvelle cité allait se développer, s'embellir et se former si, bien| à l'image de Rome elle-même que la tradition a voulue lot site s'y prêtant, que Nimes ait eu alors ses sept collines, tout comme la ville éternelle.

 

Cette tradition, née on ne sait comment et à quelle époque, s'est propagée de siècle en siècle pour le plus grand renom de notre cité ; le poète J. Reboul l'a écrite dans un quatrain célèbre et, pour qu'on ne l'oublie point, on a gravé celui-ci sur le socle de la statue d'Antonin.

 

Ainsi Nîmes est devenue à jamais « la Ville aux Sept Collines », titre qu'elle partage aujourd'hui avec celui de « Rome Française », comme on se plaît à la surnommer, non sans raison, du reste.

 

Nîmes « Ville aux Sept Collines », est-ce là une légende, comme certains le pensent, ou bien le fait d'un accident géographique, naturel ou voulu lors de la fondation de la Cité Romaine ? C'est ce que nous allons examiner dans cette étude en faisant appel à tout ce qui a été écrit à ce sujet et en nous inspirant de la carte au 1/10.000 des environs de Nimes, éditée par le Service Géographique de l'Armée et parue il y a quelques années seulement. (1930)

 

Et tout d'abord disons ici que quand on parle des « Sept Collines de Nimes » il ne s'agit pas de celles; qui entourait notre ville aujourd'hui, mais des collines que renfermait la Cité d'Auguste et d'Antonin dans son enceinte de remparts de l'an XV avant notre ère.

 

Les sept collines de Nîmes - Légende ou vérité ?

 

En 1900, le docteur Elie Mazel, un des Nîmois; connaissant le mieux notre Garrigue, écrivait dans la « Revue du Midi » un article intitulé « la fin d'une légende », dans lequel il contestait les Sept Collines de Nimes.

 

« Je dis légende, écrivait-il, parce que rien n'est moins prouvé que l'existence des dites Sept Collines et de tel nom dont on les a affublées, à moins d'y mettre une puissante bonne volonté. »

 

Voilà qui est catégorique !

 

Neuf ans plus tard : le 7 juin 1909, M. G. Maruéjol, dans un beau discours prononcé à la séance annuelle et publique de notre Académie, réfutait « la fin d'une, légende » du docteur Mazel et, non moins catégorique que lui, mais; dans un sens opposé déclarait « que si les Sept Collines n'existaient pas, il faudrait les inventer. ».

 

A l'est, le mont Duplan forme un monticule isolé qu'enveloppent les rues de l'Enclos Rey, de la Garrigue, le haut de la rue Bonfa et son prolongement, la rue de la Biche et le chemin d'Uzès.

 

A St-Luc existe ce qu'on appelle réellement un col, séparant le mont Duplan de la hauteur voisine, la Croix de Fer ou la colline des Moulins. Que l'on veuille aller du mont Duplan à la Croix de Fer, de la rue de la Garrigue à la rue de la Biche, on doit passer par ce col, point le plus bas quand on passe du mont Duplan à la Croix de Fer, point le plus haut quand on passe de la rue de la Garrigue à la rue de la Biche : le col est à l'altitude de 71,30m.

 

A l'ouest, la hauteur de Montaury domine Nimes du chemin de Pissevin, ancien chemin celtique conduisant à l'oppidum de Nages, à la route de Sauve, au delà de laquelle on trouve le cadereau de Vacqueyrolles, puis la petite; vallée suivie par la route d'Alès, si on veut atteindre la colline voisine, dont le rocher de Canteduc forme la pointe avancée les pentes est de Montaury descendent vers le Cadereau où elles aboutissent, ses pentes ouest descendent vers le chemin qui réunit le chemin de Pissevin à la route de Sauve, à hauteur des Trois Piliers.

 

Montaury forme donc bien une colline nettement limitée et isolée des hauteurs qui, à l'ouest, s'étendent jusqu'au mont Duplan.

 

Entre le mont Duplan et Montaury l'examen attentif des courbes de niveau du terrain (voir carte au 1/10.000), montre qu'il n'y a là qu'une seule et même croupe ou colline, au point de vue topographique. Longue de 1.300 mètres environ dans sa plus grande longueur, de la route d'Alès au mont Duplan, cette longue croupe va se rétrécissant de l'ouest à l'est où elle se termine par un éperon arrondi dominant, le col de St-Luc et la rue de la Posterle ; ses pentes ouest descendent vers la route d'Alès, ses pentes nord vers la petite dépression que suit le chemin de fer de Nimes à Ales, ses pentes est vers le col de St-Luc et ses pentes sud vers la ville où on peut dire qu'elles finissent au boulevard Gambetta et au Jardin de la Fontaine.

 

Si de St-Luc on parcourt le sommet de cette crête que jalonnent la rue des Moulins, un peu en contre-bas, la rue Démians, le chemin des Gazons, le chemin de la Planette, on s'élève progressivement de la côte 71-3 à la côte 85, au carrefour de la crypte St Baudile ; à la côte 97, à la croisée des chemins de la Porte Cancière ; à la côte 100 , le long du| chemin des Gazons ; puis on descend à la côte 98-1 ,au carrefour de la Planette et on atteint la côte 103-7, à quelques mètres avant d'arriver à la Tour Magne, point le plus élevé de toutes les premières hauteurs qui entourent Nîmes.

 

Dans tout ce parcours, on ne traverse aucun col, ni à la crypte St Baudile, ni à la Porte Cancière, ni entre les deux petites éminences de terrain qui entourent l'une, la Tour Magne, l'autre le chemin des Gazons où finit le sommet de la petite dépression limitée par les rues Ménard et Rouget de l'Isle.

 

De la route d'Alès au mont Duplan, il n'y a donc qu'une seule et même crête continue ne présentant aucune dépression formant col ; il n'y a donc, par suite qu'une seule et même colline, au sens topographique du mot.

 

La Légende : Nimes, ville aux sept collines.

 

Comment s'est formée la légende : Nimes, Ville aux Sept Collines ? Nous croyons pouvoir l'expliquer comme suit :

 

Nous savons que de tout temps des chemins ou passages ont traversé nos garrigues, conduisant de la villes vers», les Cévennes, fractionnant, pour ainsi dire, le terrain traversé en autant de parties ou quartiers, portant tous des noms; différents. Un beau jour, quelque écrivain a pensé que Nimes, tout comme Rome, le site s'y prêtant, devait avoir ses Sept Collines. En en comptant cinq, comme Maruéjol, du, mont Duplan à la route d'Alès, dans un terrain assez accidenté, il faut en convenir, on a complété à sept le nombre des collines et, ainsi, sans doute, s'est formée la légende de Nimes, ville aux Sept Collines.

 

A quelle époque s'est formée la légende, il est difficile de le préciser et nous avons vu par le texte du rapport des « missi dominici » de Charlemagne, combien il est difficile de s'appuyer sur des textes anciens.

 

Description des sept collines.

 

Après avoir établi, comme nous venons de le faire, que topographiquement il n'y avait que trois collines autour de Nemausus, nous allons admettre la légende des sept collines et étudier celles-ci.

 

Et tout d'abord si tout le monde est d'accord sur l'appellation des sept collines qu'on nomme actuellement : Mont-Duplan, Crémat, Puech Ferrier, Lampèze, Tour Magne, Canteduc et Montaury, on est loin de l'être sur la situation de deux d'entre elles ; le Crémat et le Puech- Ferrier; Pour les uns, le Crémat touche au mont Duplan, dont il est séparé par le col de St-Luc, pour les autres, c'est le Puech Ferrier qui suit immédiatement après le mont Duplan.

 

Ménard, dans son Histoire de Nîmes, place le Puech Ferrier immédiatement après le mont Duplan, le Crémat ensuite.

 

Maruéjol cite les sept collines dans le même ordre que Ménard et s'appuie sur le témoignage de l'ingénieur H. Gauthier « qui, dit-il, indifférent aux paperasses jaunies, mais d'esprit observateur, ayant recueilli, 34 ans auparavant, des indications identiques de la bouche même de ses contemporains, n'aurait pas manqué de rabrouer d'imposture Ménard et de lui faire la leçon s'il avait pu le prendre en défaut ».

 

Germer-Durand, dans « Les Enceintes successives de Nîmes », place le Crémat après le mont Duplan, puis le Puech Ferrier, et cela indigne Maruéjol qui s'écrie : « Comment se fait-il qu'en 1874, Germer-Durand, animé des meilleures intentions, et d'ordinaire mieux renseigné, ait eu l'étrange idée de placer à droite ce qui est à gauche ».

 

Le docteur E. Mazel, dans sa « Fin d'une Légende » écrit, d'autre part : Ni dans le compoix de 1830 ni au cours des XVII et XVIIIe siècles, ni ailleurs, je n'ai rencontré une seule fois le mot « Podium Crematum » ou « Puech Crémat ».

 

Il serait intéressant de préciser la date et de connaître le nom de celui qui le premier a employé ce vocable de Puech Crémat.

 

Il semble qu'à l'origine, l'appellation de Puech Ferrier désignait l'ensemble des Garrigues du nord de la Cité et a été appliquée à une étendue de terrain bien plus considérable, comprise entre les cadereaux d'Uzès et d'Alès, Dans les différents textes, il s'étend de la Croix de Fer, à l'est, jusqu'à la jonction, à l'ouest, des rues actuelles de la Porte Cancière et de la Lampèze, et plus loin encore. Dans le voisinage de ces dernières, il a porté successivement les noms de « Podium Ferrarium », en 1145, de « Podium Ferre », et de « Podium Buzanquet », en 1360.

 

Et comment se fait-il que le nom de Puech Ferrier, désignant la plus grande étendue de nos coteaux, soit totalement effacé de la mémoire des Nîmois, quand celui de Puech Crémat se trouve sous toutes les plumes.

 

Cette dernière remarque du docteur E. Mazel est très exacte. Tous les Nîmois connaissent, en effet, le mot Crémat, sans savoir, bien souvent ce que ce mot là désigne ; si on demande à quelqu'un, même à ceux qui semblent le mieux connaître notre ville, « qu'est-ce que le Crémat? où est-il ? », Invariablement on répond : « II y a quelque part la rue du Crémat, mais j'ignore ce que c'est que le Crémat. »

 

Par contre tout le monde ignore le mot Puech Ferrier ce qu'il signifie et où se trouve ce Puech.

 

Le mot Crémat est généralement connu parce que de nos jours il y a une rue qui porte ce nom, rue de création récente puisque A. Michel n'en fait pas mention dans son ouvrage sur « les Rues de Nimes » ; cette rue va de la crypte St Baudile à la rue Bonfa, qu'elle rejoint, au réservoir qui borde cette dernière rue, entre St-Luc et le réservoir de la rue Porte d'Alès.

 

Si on se reporte au cadastre, établi en 1832, on trouve, en allant de l'est vers l'ouest :

 

1° le Grand Puits, qui était alors le nom du quartier du mont Duplan actuel.

2° le Petit Puech, quartier compris entre la, rue de la Garrigue et la crypte St Baudile.

3° la Garenne, quartier qui fait suite au précédent et s'étend jusqu'à la Lampèze.

 

Sur un plan N° 13, des Archives municipales, datant de 1783, portant le titre de: Porte Cancière et Moulins à Vent du Puech Ferrier, nous voyons, tracés en rouge, les anciens remparts romains, du col de St-Luc à la Porte Cancière ; ce Plan indique bien que le Puech Ferrier avoisine la Porte Cancière comme nous le disons plus liant, en citant le docteur E. Mazel.

 

Pour toutes les raisons ci-dessus, nous estimons, puisque l'une des Sept Collines porte le nom de Crémat, que celle-ci ne voisine pas avec la Porte Cancière, alors que le Puech Ferrier lui est limitrophe, que la colline du Crémat fait suite au mont Duplan et que la colline du Puech Ferrier vient ensuite. Comme conséquence, en allant de l'est vers l'ouest, et en suivant le tracé des anciens remparts romains, voici les Sept Collines de Nîmes :

 

Le mont Duplan - le Crémat - le Puech Ferrier - la Lampèze - la Tour Magne - Canteduc - Montaury.

 

Le Mont Duplan

 

Nous avons indiqué plus haut les limites de cette colline, nous n'y reviendrons pas ici.

 

Le nom actuel de cette colline rappelle celui de M. le Maire de Nimes, M. Duplan qui transforma cette colline nue et aride en une jolie promenade, en complète transformation actuellement. (1935)

 

En 1858, on commença à acheter les moulins, au nombre de 7 ou 8, disséminés sur cette colline, puis, on agrandit à coups de mine les crevasses et les fissures naturelles afin de ménager dans les rochers la place nécessaire aux arbustes qu'on voulait y planter. Cela fait, on y transporta la terre silicieuse qui se trouvait dans le cimetière désaffecté depuis 1830 et situé au pied de la colline, près du chemin d'Uzès, puis on fit les plantations d'arbres et d'arbustes; verts et on traça des sentiers. Tous ces travaux furent terminés en 1861, mais ce ne fut que 4 ans plus tard que la colline fut transformée en véritable promenade, car il fallut tout au début y remplacer les arbustes à mesure qu'ils dépérissaient. En 1869, la Société des Eaux de Nîmes, concessionnaire des eaux du Rhône à prendre au Pouzin, fit ouvrir au pied du mont Duplan une galerie dans la roche calcaire, sur une longueur de 8 à 10 mètres, pour l'adduction des eaux destinées à l'alimentation de la ville. Ce souterrain aboutissait à un vaste réservoir creusé dans les terrains sablonneux de l'ancien cimetière et, de là, à une conduite de distribution en maçonnerie dont on apercevait encore l'amorce avant la construction du groupe scolaire actuel.

 

Suivant Ménard, les Juifs de Nimes avaient dès 1295, un cimetière particulier, quelque part sur cette colline qui prit dans la suite le nom de « Piu Jusieu » ; ce cimetière relevait du monastère de St Baudile et les religieux en avaient cédé l'usage aux Juifs à condition qu'il leur serait donné deux sols ou une livre de poivre pour chaque mort qui y serait enterré.

 

Le mont Duplan a porté successivement les nom de :

Podium Judaïcum, en 1030 et en 1055, cartulaire de N.-D. de Nimes et suivant Ménard.

Podium Judeum, en 1380, compoix de Nimes.

Puech Jusieu, en 1479, la Taula del Poss. de Nîmes.

Puech Jésiou, en 1671, compoix de Nimes.

Grand Puits lors de l'établissement du cadastre en 1832.

 

Le Crémat.

 

Nous donnerons pour limites à la colline du Crémat la rue de la Garrigue et le col de St-Luc à l'est, et, à l'ouest, la rue du Crémat et la rue Rangueil, dont le tracé général marque une légère inflexion des courbes du niveau du terrain.

 

Le Crémat, ainsi délimité correspond à ce qu'on appelle aujourd'hui « la Colline des Moulins » (on en compte encore trois de St-Luc à la crypte St Baudile), et à cette partie de nos anciens coteaux désignés sous le nom de « Tresfons » les trois Fontaines. C'est encore le « Mons Martyris », le mont du Martyr, en souvenir de St-Baudile qui y fut martyrisé, vers la fin du III° siècle.

 

Suivant la légende, la crypte actuelle, avec ses trois sources, située hors et près des murs de la ville (murs romains) marquerait le lieu même où St-Baudile fut décapité, et la rue des trois Fontaines, qui y conduit de St-Luc, le souvenir de la tête du saint qui rebondit trois fois après qu'elle eut été détachée du tronc et qui, à chaque bond fit jaillir une source.

 

Rappelons que l'eau de chacune de ces sources possède, dit-on, un don particulier. L'eau de la première de ces sources, la plus rapprochée du maître-autel et la plus. abondante,, guérit les maladies des yeux ; celle de la deuxième source, dans la chapelle actuelle, guérit les estropiés, comme en témoignent les crosses et les béquilles laissées là en ex-voto par les malades guéris ; celle de la troisième, enfin, à l'entrée de la crypte, guérit les maladies de peau.

 

L'étymologie du mot Crémat est incertaine et a donné lieu à interprétation.

 

« Le mot commun de Crémat, dit le docteur E. Mazel, qui se comprend bien vite, s'applique à divers tènements incendiés à une date et pour une cause quelconques, et comprend des herbages, vignes, olivette, etc... »

 

A quoi Maruéjol réplique : « Eh ! pas si vite, mon cher confrère, quand vous dites que le mot Crémat « se comprend bien vite ». Depuis le XIVe siècle, ce mot ne s'applique qu'à un quartier en plaine, dit aujourd'hui du moulin Raspal, et l'autre à la colline urbaine que je délimitais tout à l'heure en partie haute et dont le flanc méridional, en forme d'éventail renversé, occupe à l'extrême base, presque toute la longueur du boulevard Gambetta depuis la Bouquerie jusqu’à l’église St-Charles.

Le Crémat, ajoute plus loin Maruéjol, doit à son exposition naturelle d'être brûlé des feux de la canicule ».

 

Le Puech Ferrier

 

Nous donnerons comme limites au Puech Ferrier les rues Rangueil et du Crémat, à l'est, et à l'ouest, la rue de la Lampèze.

La rue Démians actuelle en Jalonne la crête dans toute sa longueur.

    Cette colline a porté successivement les noms de :

    Podium Crematum, en 1145 et 1185, suivant Ménard.

    Podium Ferre, en 1380, d'après le compoix de Nîmes.

    Podium Ferrarium, en 1463, suivant Ménard.

    Pied Ferrier, en 1671, d'après le compoix de Nimes.

    Puech Ferrier, sive Puech des Moulins à Vent, en 1695, suivant les archives des hospices de Nîmes.

C'est sur un rocher de cette colline que fut construit en 1687, le Fort ou Citadelle, que nous appelons aujourd'hui la Maison Centrale.

 

L'étymologie du mot Ferrier est mal connue ; ce mot viendrait, dit-on, des Forges qui existait jadis dans les parages du mont Ferrier ; il viendrait, d'autre part, du mot Ferrier nom quelconque aujourd'hui, mais qui aurait pu avoir autrefois une signification bien définie, comme, par exemple, le nom d'un des principaux propriétaires de cette portion de nos Garrigues. Pour Maruéjol, qui tire l'étymologie de nos collines de l'action que les rayons solaires exercent sur elles, le Puech Ferrier « tire son nom du roc dénudé, bien connu de nous tous, qui s'illumine au choc des rayons solaires comme le fer sous l'éclat de ses grisailles aux reflets métalliques ».

 

Disons ici que ce qu'on appelle « Mont Margarot » aujourd'hui, c'est tout simplement la petite plantation de pins qui se trouve derrière la Maison Centrale, entre la rue Maucomble et la rue de la Porte Cancière ; il doit son nom à M. Margarot, ancien maire de Nimes, qui créa ce joli coin sur les pentes du Puech Ferrier.

 

La Lampèze

 

Nous donnerons pour limites à la Lampèze, la rue du même nom à l'est, et, à l'ouest, la rue| Ménard qui jalonne sensiblement une inflexion assez prononcée des courbes de niveau du terrain.

Le chemin des Gazons actuel en jalonne la crête.

 

« La Lampèze, a écrit le docteur Fortuné Mazel, le fils du docteur Elie Mazel que nous avons longuement cité, tire son nom d'un enclos, actuellement construit, lequel relevait du sacristain de la Cathédrale. Il était complanté d'oliviers et ceux-ci fournissaient l'huile destinée à l'entretien de la lampe du sanctuaire. Cette étymologie du mot « Lampèze » est historiquement exacte. (Voir la Revue du Midi, 1906, les Rues de Nimes par le Dr F. Mazel). Cette étymologie du mot « Lampèze » est encore celle du chanoine François Durand.

 

Pour Maruéjol, il en est tout autrement et; il se rit de ce « conte à la mère grand » ci-dessus. « La vérité a tout autre allure, dit-il, la Lampèze, prêtant sa croupe rebondie aux réverbérations du soleil, a été simplement assimilée à une lampe ou plutôt, selon l'acception propre du mot, à un « lampas » qui nous vient de la Grèce en passant par Rome, c'est-à-dire à un flambeau allumé, à une torche embrasée ».

 

La Tour Magne

 

La colline de la Tour Magne s'étend de la rue Ménard jusqu'à la route d'Alès, dans sa partie nord-ouest ; elle peut être délimitée de la colline de Canteduc qui suit, par le sentier qui, du Mas Rouge descend vers le Temple de Diane ; au sud elle aboutit au Jardin de la Fontaine.

 

Elle est citée dès 994 sous le nom de « Mons Excelsus » ou de « Turris Magna », d'où l'étymologie de son nom.

 

La création du massif boisé qui s'étend de la Source jusqu'à la terrasse du Mas Rouge, est due à l'initiative de l'ancien préfet du Gard, M. d'Haussez et à celle de l'ancien maire de Nimes, M. Cavalier : de là vient le nom de mont d'Haussez ou de mont Cavalier donné quelquefois à la colline de la Tour Magne, ou tout au moins au massif boisé ci-dessus.

 

La plantation de pins qui s'étend du Mas Rouge au pied de la Tour Magne est due à l'administration de M. Girard.

 

Signalons que le point le plus élevé de toutes les hauteurs qui entourent directement Nimes se trouve derrière la Tour Magne et que son altitude est de 108,7, alors ; que le sommer du mont Duplan côte 87,6 et le sommet de Montaury 105.

 

Canteduc

 

La colline de Canteduc est formée par l'éperon rocheux qui domine l'avenue de la Plateforme et prolonge, à partir du Mas Rouge, la terrasse supérieure du Jardin de la Fontaine.

 

La partie supérieure de la rue de Combret, établie sur l'ancien rempart romain, jalonne une partie de sa crête.

 

La carrière située à l'ouest du chemin de Combret et qui forme comme une falaise à l'extrémité de la colline, a été exploitée à l'époque romaine pour la construction des remparts.

 

Le nom de cette colline viendrait de l'expression « lieu où chante le hibou ou petit duc ».

Pour Maruéjol, l'étymologie du mot Canteduc est tout autre.

 

Les Gaulois, écrit-il, indifférents à la magie des nombres, paraissent avoir tenu pour sacré le nombre six, base, de leur numération : ils ne comptèrent donc que six collines, confondant sous le seul nom de « Cantodumum » et le monticule où longtemps après, s'élèvera la Tour Magne, et son éperon occidental qui s'appelle encore aujourd'hui Canteduc.

 

Pour bien marquer leur mainmise sans heurter de front de vieilles croyances, les magistrats romains chargés d'organiser la colonie de Nimes furent attentifs à laisser à la plupart des noms des collines leur sens de la première^ heure, se contentant de les traduire par des mots latins. Le seul nom de « Cantodunon » fut maintenu dans sa forme gauloise, mais ce ne fut là qu'un geste hypocrite de respect, et le vénérable nom n'avait échappé au travestissement commun que pour se voir relégué à l'extrémité minuscule de son ancien domaine. Quand au -massif principal, une appellation nouvelle lui fut donnée et il y eut désormais la colline de la Tour Magne, « Turris Magna ».

 

Cantodunon est un mot gaulois composé signifiant littéralement « citadelle » ou « colline blanche », colline incandescente, nouvel aspect des splendeurs solaires.

 

Cette colline a été successivement désignée sous les noms de :

    Podium Combretum, cartulaire de St Sauveur de la Font.

    Mons de Cumberto, en 1160.

    Puech Combret, compoix de 1761.

    Puech Canteduc, en 1861, suivant A. Pellet.

 

Montaury

 

Nous avons donné plus haut les limites de cette colline, nous n'y reviendrons pas ici.

 

Montaury, c'est le Mont d'Or, et la-dessus tout le monde est d'accord. Cette colline a été successivement désignée sous les noms de la Monte Aureo, en 1080, cartulaire de N. D. de Nimes.

 

Podium Aureum, en 1093, suivant Ménard.

In Monte Aurio, en 1114, suivant le cartulaire de N. D. de Nimes.

Mons Aureolus, en 1115, suivant les archives départementales.

Ad Montes Auri, en 1380, compoix de Nimes.

Montaury, en 1479, en 1534, en 1552, en 1671, suivant divers documents et le compoix de Nimes.

Toutes ces diverses appellations font de Montaury, le Mont d'Or, d'où l'origine de son nom actuel.

 

« Montaury, écrit Maruéjol, c'est l'aboutissement régulier du latin « Montem aureum », la « montagne d'or », qualification dont vous apprécierez la justesse si vous avez vu, ne fut-ce qu'une fois, la lumière du soleil tomber d'aplomb en plein midi, sur le coteau à la terre jaunâtre et l'envelopper, vers le soir, d'une auréole de feu. »

 

René Bazin, dit-il encore, moins soucieux d'étymologie, a écrit dans l'Isolée que, sur les pentes de Montaury « il y voit scintiller l'or jusque sur l'aile des linots qui voltigent dans ces parages ».

 

Les Collines et les Arènes.

 

Dans son « Etude sur les Monuments antiques de Nimes », le chanoine F. Durand a consacré un chapitre à l'orientation des Arènes auquel nous empruntons les lignes suivantes, pour compléter notre Etude sur les Sept Collines de Nimes.

 

On a cru longtemps que les Arènes étaient orientées vers les quatre points cardinaux, le grand axe allant de l'Est à l'Ouest et le petit axe du Nord au Sud...

 

La raison de la position des Arènes n'a rien de commun avec les points cardinaux. Pour le comprendre, il faut se souvenir qu'à l'époque gallo-romaine les environs du monument étaient dégagées ; c'était presque la campagne, au centre de laquelle s'étendait le Forum, dont la maison Carrée était le plus bel ornement. La ville se développait sur les collines, depuis Montaury jusqu'au Mont Duplan. Nous connaissons très exactement la ligne des remparts romains ; elle affectait la forme d'un vaste éventail, dont les Arènes constituaient le clou gigantesque. Ainsi, le grand axe de l'amphithéâtre s'étendait en regard des sept collines, et les promeneurs dans la galerie du premier étage, contemplaient l'ensemble de l'antique Nemausus.

 

Pour se rendre compte de cette situation, il n'y; a qu'à prendre une carte de la ville, et on verra que le petit axe des Arènes, prolongé vers le Nord-Ouest, partage en deux sections sensiblement égales l'étendue des collines de Montaury au Mont Duplan.

 

Du haut de la ville romaine, on voyait les; Arènes dans leur plus grande largeur, dont la monotonie était rompue en; son milieu par la travée où émergent deux taureaux et un superbe fronton triangulaire.

 

Conclusion.

 

Après cette longue étude où nous avons recueilli les diverses opinions émises sur nos collines, nous conclurons :

 

Conservons à Nimes son titre de « Ville aux Sept Collines » et que la légende l'emporte sur la vérité géographique, pour le plus grand renom de notre vieille cité ; ne le séparons pas du surnom de « Rome Française », qu'on lui donne aujourd'hui et qui a fait écrire à Mazauric ces lignes si judicieuses :

 

« La domination romaine a laissé dans notre région des traces si nombreuses et si importantes que, pour qu^ veut connaître toute la splendeur de cette civilisation, un pèlerinage à la vieille cité de Nemausus s'impose, même après la visite de Rome et de Pompéi. »

 

Que Nîmes reste donc la Ville aux Sept Collines et ainsi nous pourrons répéter avec notre grand poète Reboul :

.

…Le Nîmois est à demi romain

Sa ville fut aussi la Ville aux Sept Collines,

Un beau soleil y luit sur de belles ruines

Et l'un de ses enfants s e nommait Antonin.

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