Anecdotes et histoire de "la placette" de Nîmes
extrait de Histoire de Nîmes au XIX et XXe siècle



LA PLACETTE, HIER, AUJOURD'HUI

1832
- En été, d
es désordres publics liés à cette période politiquement trouble viendront perturber la vie sociale. Dans la journée du 14 août 1832 plusieurs disputes s'engagèrent sur divers points de la ville, des groupes se formèrent particulièrement sur le soir. Des personnes surexcitées et armées étaient prêtes à tout. Effrayé un certain Valladier tirait de sa fenêtre un coup de fusil en l'air.  
Le 15 au matin, une bataille à coup de pierre s'engagea à la Placette et à deux heures se continuait du côté de la Bourgade. Des forces de l'ordre placées autour de ce quartier permirent de rétablir provisoirement le calme. Un peu plus tard, du côté de la Bouquerie une confrontation dégénéra en bataille rangée, les gendarmes reçurent l'ordre de dégager la voie publique. L'infanterie de son côté chargea publiquement ses armes, cette démonstration énergique suffit à calmer les esprits. Mais, si tout rentra dans l'ordre, la haine et les ferments de discorde se réservaient pour l'avenir.

1848 - En plein préparatifs d'élections à Nîmes, les esprits s'échauffèrent. Les 10 et 11 avril 1848 des bagarres se déclenchèrent autour du quartier de la Placette, sur le chemin de Montpellier, dans la rue de l'Hôtel Dieu et sur la promenade du Cours-Neuf (Jean-Jaurès). Des bandes échangèrent des coups de pierre, il y eut de nombreux blessés et la force armée eut toutes les peines du monde à séparer les combattants. Ce n'est qu'après une charge à la baïonnette que l'ordre fut enfin rétabli.

1872
- Le 4 septembre 1872, les républicains voulurent fêter à leur manière le second anniversaire de la proclamation de la troisième République. Une foule compacte de près de 5000 personnes se répandit sur la Placette et dans les rues adjacentes. Tout ce monde avait arboré des cocardes, des cravates et des ceintures rouges et pour mieux marquer le sens de cette manifestation, des bustes de la République, coiffés de bonnet phrygien avaient été placés sur les fenêtres. Des farandoles s'organisèrent pendant que des banquets réunissaient un grand nombre de convives, au milieu de chants révolutionnaires.
Le Maire royaliste, Adolphe Blanchard, ayant fait afficher un arrêté interdisant toutes manifestations ce jour là, le préfet envoya sur les lieux un détachement de gendarmes à cheval et un fort peloton d'infanterie qui vint prêter main-forte à la police. Selon les chroniqueurs de l'époque les forces de l'ordre furent bien accueillies au premier contact, les choses se dégradèrent rapidement lorsque les manifestants réalisèrent qu'elles étaient chargées de disperser leur manifestation.
Tout cela dégénèrera en un affrontement dont les divers commentaires de l'époque, orientés et non objectifs, ne peuvent être retenus comme renseignements fiables.Toutefois, le parti légitimiste du maire royaliste Blanchard, perdra toute sa crédibilité dans cette affaire à la lecture de l'histoire en remettant, quelques jours plus tard, un manifeste au roi... le Comte de Chambord, désigné comme " le régénérateur de la patrie ".
Ce manifeste recouvert de bleu de France, orné de la couronne royale ainsi que les armes de la ville de Nîmes, avait ses ornements en relief, en argent massif.
Pour les lecteurs qui n'auraient pas bien suivi la chronologie des évènements, nous étions en République depuis 2 ans...


1909 - Lors de la réunion du 23 avril 1909, le Conseil Municipal accorde une subvention à la commission des fêtes de la Placette, pour l'organisation des fêtes de printemps des 15 et 16 mai.
Avec au programme, le samedi, retraite aux Flambeaux dans le quartier, grand bal sur la placette, dimanche matin à dix heures, concert instrumental par une musique, apéritif d'honneur auquel seront invités les membres du Comité d'honneur. Concours de balcons et fenêtres fleuris. Après-midi, distribution en musique des prix décernés par un jury. Distribution de fleurs aux dames et demoiselles, fête enfantine, goûter aux enfants, bal, apéritif et le soir grand bal. 
Deux mois plus tard, la fête du 14 juillet sera organisée autour du thème "République Sociale". Ces festivités jugées, excessivement politisées, provoqueront un changement de Préfet, Maitrot de Varenne, et l'invalidation du Maire, Marius Valette.

Entre les 2 guerres (14-18 / 39-45)
La population de la Placette constituée essentiellement d'une population ouvrière locale, sera progressivement modifiée par l'apport d’immigrés italiens et réfugiés espagnols.


La Consolation, quartier du Cadereau au début du XXe siècle.

Après la Seconde Guerre mondiale
Une autre évolution verra le jour, suite aux importants travaux engagés par la municipalité Tailhades (1947-1965) aux 4 coins de la ville, la couverture du Caderau et son aménagement avec construction d'immeubles longeant cette nouvelle avenue, sur l'emplacement des anciens abattoirs et sur l'espace réservé aux nomades appelé "l
a Consolation", la population Gitane sera priée de trouver un nouvel emplacement. Provisoirement de nombreuses caravanes occuperont le Camping Municipal situé route de Montpellier à côté de l'actuelle Chambre des Métiers.
Au début des années 1960, avec la construction des immeubles du Chemin Bas, destinés à accueillir le flot de réfugiés Pieds-Noir, de nombreux habitants des anciens faubourgs vont déménager pour ce nouveau quartier moderne, "véritable cité radieuse pleine de promesses ! ".

De nombreux appartements devenant libre, un important regroupement de familles gitanes se fera tout autour de cette place, car à cette époque quelques familles originaires de cette communauté y habitaient déjà.  Elle était très prisée, car située non loin du Cadereau où, pour certains, des anciens y avaient vécu depuis plus de deux siècles.

Ce quartier aux couleurs particulières, avec une forte population gitane d'origine espagnole, accueillera entre autres, des spectacles de Flamenco au cours des différentes ferias, il contribuera ainsi à enrichir la vie culturelle nîmoise.


Protégé naturellement par une population désireuse d'éviter tous les problèmes que l'on trouve dans les grands ensembles, où règne anarchie et désordre, "
la placette" reste encore à ce jour un lieu convivial où il fait bon vivre.


Georges Mathon, décembre 2010

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Évolution de l'environnement
du quartier de la Placette aux XIXe et XXe siècles.

Extrait de Nîmes aux XIXe et XXe siècles, www.nemausensis.com


Quartier de la Placette, plan de 1901.

Après la révolution le quartier de la Placette et ses environs, sera l'objet de toutes les attentions de la part des municipalités successives. En premier on pensera à nourrir les âmes, avec la construction d'un temple et d'une église de proximité. Par la suite, changement d'orientation après 1880, avec la prise de pouvoir de municipalités républicaines, réalisation d'équipements, d'enseignements laïques, sportifs et loisirs. Et cerise sur le gâteau, une Caisses de Sécurité Sociale ainsi que celle des Allocation Familiales, qui seront installées à l'angle d'une rue qui donne sur la placette... quelle revanche pour ce quartier qui auparavant était tout juste bon à accueillir des hospices, des égorgeoirs et abattoirs et un cimetière juif.
Ci-dessous détails de cette évolution :


Le Marché aux bœufs
1850 - L'emplacement du jeu de mail sera occupé en partie par le nouveau marché aux bœufs dont la création remonte au 21 mars 1850. C'est à l'extrémité de la rue du Mail, à l'angle du Cours-Neuf (Jean-Jaurès), que se trouvait le cimetière juif. Son terrain d'une surface de 508 m2, leur avait été concédé en 1785. Par la suite, la communauté juive voulant clôturer le cimetière, obtient de M. Valory, alors maire de Nîmes, l'autorisation de prendre les moellons qui leur étaient nécessaire parmi les démolitions des maisons des Arènes. Devenu trop petit, il fut abandonné en 1826, la communauté ayant acquis un nouvel emplacement chemin de Saint-Gilles. La loi juive s'opposant à ce qu'aucune construction ne puisse s'élever sur un cimetière, il fut rendu inaccessible par une clôture. Cette situation perdura jusqu'en 1903, date de son aliénation, permettant ainsi la construction de nouveaux immeubles sur son emplacement.

Les lavoirs du Marché aux Bœufs
1856 - La place d'Assas laissée libre par la suppression des lavoirs devait être mise en vente à des particuliers. Cette décision remontait à 1849, la situation financière de la ville s'étant améliorée on décida de conserver cet espace public.
Par la suite, des lavoirs en remplacement de ceux de la place d'Assas seront créés Boulevard de la République (avenue Jean-Jaurès) et adossés à l'Ouest des bâtiments du Marché aux bœufs (emplacement de l'immeuble Cévennes situé à côté de Pablo Néruda.)


Le Temple de l'Oratoire

1856 - La municipalité Pérouse décide de construire un temple protestant à l'Oratoire sur l'ancien emplacement des abattoirs aux porcs.
L'année suivante, le premier acte municipal du maire nouvellement élu, Jean Duplan, fut la pose de sa première pierre. Il sera reconstruit en 1870, car il menaçait ruine.
Antoine Bigot, personnage incontournable de l'histoire de la Placette, y officiera en tant que Diacre.

L'église Saint-François-de-Sales
1865 - Il était à craindre en outre que le voisinage de nombreux protestants dans le faubourg (Oratoire, placette rue Porte de France) ne vînt amoindrir l'esprit catholique dans un peuple privé d'instruction religieuse. Mgr l'évêque résolut donc de procurer à cette partie du troupeau confié à son zèle la possibilité d'assister aisément aux offices, et de puiser dans la fréquentation de l'église l'abondance de la vie religieuse.
Dans ce but, un terrain fut acheté au centre même du faubourg et un traité fut passé, le 24 septembre 1864, avec des entrepreneurs qui se chargèrent d'y bâtir une chapelle des deniers mêmes de l'évêque ; lorsque les travaux furent suffisamment avancés pour qu'on pût en prévoir l'achèvement prochain, Mgr Plantier écrivit au préfet du département, le 2 mai 1865, pour lui faire part du projet d'érection de la nouvelle Chapelle de Secours, et lui en faire comprendre l'absolue nécessité ; et trois jours après, le 5 mai, il rendit son ordonnance d'érection.
L'église et la cloche furent bénites, le 27 octobre 1865 suivant, par M. l'abbé de Cabrières, vicaire général, et la cérémonie d'installation du curé fut indiquée pour le dimanche 29 octobre. Un incident regrettable la fit renvoyer ; ce fut une dépêche du préfet du Gard à Mgr l'évêque, par laquelle ce magistrat semblait voir dans l'ouverture de la nouvelle chapelle une violation des articles 61 et 62 de la loi du 28 germinal, an X.
Mgr Plantier ne voulait pas laisser son œuvre incomplète ; pour en assurer les résultats déjà si considérables, il commença les démarches nécessaires pour l'érection de la chapelle en succursale. Dès les premiers jours de janvier 1866, les conseils de fabrique de Saint-Paul et de Sainte-Perpétue furent appelés à délibérer sur la question, et tous les deux déclarèrent ne pas s'opposer au projet de l’Évêque, celui de Saint-Paul par délibération du 7 janvier, celui de Sainte-Perpétue par délibération du 14 du même mois.
Le 3 février suivant, une lettre de Mgr Plantier saisit le Conseil municipal d'une double question, celle de l'opportunité de l'érection en succursale et celle de l'acquisition par la ville de l'édifice religieux et de son mobilier, au prix de 30,000 fr.


École de l'Oratoire
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En 1882, la municipalité vote un budget de 6500 frs destiné à l'acquisition de maisons place de l'Oratoire, pour y construire une nouvelle école publique. L'école de l'Oratoire fut construite à la même époque que le lycée de garçons,1884/87 (baptisé tardivement, 1963, Alphonse Daudet).


1962, visite de M. Maurice Herzog, Haut Commissaire à la Jeunesse et au Sport sur les lieux de la construction du Centre Culturel et Sportif (futur Pablo Neruda). Sur la photo, Michel Boyer donnant des explications au ministre Maurice Herzog et la maquette du bâtiment avec l'immeuble Aigoual. Document Collection Michel Boyer.

Centre culturel et sportif Pablo Neruda
1960 - Au cours des années 1960, un complexe sportif, social culturel sera construit sur l'emplacement du Marché au bœufs. Initié par la municipalité Tailhades avant 1965, il sera achevé par la municipalité communiste d’Émile Jourdan. Cet ensemble comprenait une salle omnisports, une piscine, un petit théâtre, une salle de conférence et bien d'autres équipements.
Adossé sur sa partie Est, se trouvent, les sièges et guichets de la sécu et des allocations familiales.

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.Sézéto de la Placeto

Fable imitée de La Fontaine, par Antoine Bigot
Extrait des Mémoires de l'Académie de Nîmes, 1883, pages 299 à  303.

Es acò yé disian Sézéto.
Soun pèro èro un racho, osco ! et di Madu ;
Mai poudié escouta ploouré. Avié pér lou ségu
Dé ben ou sourél, d'arjen rescoundu,,
Sa démuranço à la Placeto.
Un aso, emb'un carétoun blu.

A quatorze an, Sézéto éro une fiyo facho,
Avié'no bouco roso, uno pel dé satin,
Lou nas ou ven, lou péou bloundin,
Et d'ieul... à coupa la moustacho.

Ero poulido et s'en crésié,
Acò la rendié rédo et fièro,
Vouyé pa travaya i tapis sus lou mestié,
Ni i tresso de Guérin, ni i'lacet de Payié,
Ni mèmo caoudéjà bugado embe sa méro,
Acò èro trò groussié ; vouyé'n mestié pu fin ;
Et patin et coufin. -
Tantiya qu'à la fin
Se météguè modisto encò di sur Mazieiro,
Ounté venguè premieiro ouvrieiro.
Etcoumo avié bon biaï et qu'avie quaouqui soou,
Li galan yé végnien coumo la Fon quan ploou !
Jujas se tout acò vou la faguè pu rédo....

> Suite du texte intégral en version PDF originale


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L'article en lien ci-dessous, écrit en 1845 avec son côté excessif et raciste ne reflète absolument pas la réalité. L'histoire de cette population, à ce jour définitivement sédentarisée en est la preuve.
> Les Bohémiens à Nîmes en 1842
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Collection Gérard Taillefer


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