AVENUE FEUCHÈRES
Allant de la place de l'Esplanade au boulevard du Viaduc.




En 1842, sous l'administration de Ferdinand Girard, maire, lorsque la construction de l'embarcadère du chemin de fer de Nîmes à Montpellier fut décidée, le conseil municipal vota la création d'une large avenue qui devait aller de l'Esplanade, dont le niveau dut être abaissé, audit Embarcadère. Cette superbe promenade, qui constitue une entrée de ville comme il y en a peu en France, a reçu le nom d'avenue Feuchères, et voici pourquoi :
Le maréchal de camp, baron Feuchères, ayant commandé pendant plusieurs années la subdivision du Gard et considérant Nîmes comme une seconde patrie, avait, pour des motifs que nous n'avons pas à discuter.; manifesté l'intention de ne pas profiter pour lui-même de la fortune de Mme Sophie Dawes, baronne de Feuchères ; en conséquence il fit les donations suivantes :
A l'armée, 100,000 f
destinés à fonder 16 prix annuels pour les enfants de troupe.
Aux hospices de Paris, 94,000
Aux hospices de Nimes, 50,000
Aux hospices de Génolhac, 15,000
Aux hospices de Privas, 5,000
A l'évêché de Nimes, 50,000
Au consistoire de Nimes, 25,000
devant être convertis en secours de 150 à 200 fr. à des familles indigentes.
A l'église Sainte Perpétue de Nimes (sa paroisse). 5,000
Aux inondés du Gard, 50,000
Aux inondés de l'Ardèche, 20,000
Total, 514,000
Il avait même déclaré que s'il gagnait le procès engagé contre la susdite succession il destinait 4 millions à la ville de Nîmes pour l'établissement d'une école des Arts et métiers qui devait être construite derrière l'embarcadère et dans l'axe de l'avenue. Mais une transaction judiciaire ayant en lieu, ce projet n'a pas pu se réaliser. Toutefois, en présence d'une aussi grande libéralité, puisque le département du Gard figurait pour 195,000 fr. le conseil municipal décida, le 11 novembre 1842, que le nom du général de Feuchères serait donné à la nouvelle avenue et qu'un buste en marbre, représentant les traits du bienfaiteur, serait placé à l'hôpital des malades. Ce buste a été en effet exécuté par le célèbre sculpteur Pradier et mis en place au mois d'avril 1850.
C'est sur cette avenue qu'a été construit le nouvel hôtel de la Préfecture d'après les plans de M. Armand Feuchère.
Les divers travaux de déblaiement de l'ancienne esplanade qui était en contre haut, de construction des trottoirs, aqueducs, balustrade, pavage et terrassement du boulevard du Viaduc, le tout exécuté par M. Astruc, entrepreneur, se sont élevés à la somme de 214,542 fr. 34, et la fontaine de l'Esplanade â 189,000 fr.
Des deux côtés de ce boulevard ont été construites de très belles maisons, en sorte que cette avenue est réellement digne d'une grande ville. On comprend que la municipalité en faisant une pareille création ne pouvait pas laisser les propriétaires riverains libres de construire à leur fantaisie, et que sans imposer un plan uniforme, elle avait cru devoir prendre certaines mesures d'ordre. A ce sujet, il peut être intéressant de voir ce qui fut décidé par le conseil municipal dans sa séance da 24 février 1842. Cette délibération porte :
« Considérant qu'il résulte de l'arrêt du 12 octobre 1782 que la ville possède le droit d'imposer des conditions particulières de construction aux propriétaires, qui, par dérogation audit arrêt, seront autorisé a à bâtir an sud de l'Esplanade.
Considérant qu'il est d'utilité publique que la ville exerce un droit de surveillance sur les constructions qui seront élevées sur l'avenue du chemin de fer, en cherchant toutefois à. concilier les convenances architecturales les encouragements que la ville doit en même temps a donner au prompt développement du quartier. »

Le conseil municipal délibère:
« 1° Les propriétaires ou entrepreneurs qui élèveront des constructions sur l'avenue du chemin de fer de Montpellier, seront tenus de donner à leurs maisons au moins un premier étage, en conservant une distance de quatre mètres au moins entre le pavé du rez-de-chaussée et le pavé du premier étage.
2° les propriétaires qui élèveront leurs maisons en arrière de l'alignement, seront tenus d'établir sur ledit alignement une grille en fer.
3° tous les propriétaires, sans distinction, qui construiront sur la dite avenue, seront tenus, préalablement à toute exécution, de soumettre leur plan à l'approbation du conseil municipal. »

Jusqu'à présent, sauf pour le mur de clôture du pensionnat de l'Assomption, (actuel collège Feuchères) tous les propriétaires se sont conformés à cette délibération. Aussi voyons-nous que dans sa séance du 21 septembre 1849 sous la présidence de MM. Eyesette, maire, Vidal et de Tessan, adjoints, le conseil ayant à délibérer sur le plan d'élévation de la maison de M. Gaidan-Giran, profita de cette occasion pour affirmer de nouveau le droit de la ville et prit la délibération suivante :

« Le conseil, réservant expressément le principe établi par la délibération du 24 février 1842, déclare autoriser comme clôture provisoire la mur en moellons ordinaires élevé au devant de l'institution y de l'Assomption. »

Le conseil municipal était ainsi composé: MM. Eyssette, maire; Vidal et de Tessan, adjoints ; de Rochemore d'Aigrement, Lamarque, Bouchet, Valat, Gamel, Vachet, Laurent, Gibert, Rame, Bancel, Aubert , Et. Conte, Soustelle, Raizon , Conte Ulysse, Béchard et Curnier.

Ce provisoire s'est cependant perpétué jusqu'à ce jour, et il serait à désirer que la décoration de l'avenue, à l'endroit surtout qui est .le plus en évidence, fut complétée au moins par une grille en fer, et que le trottoir fut entretenu en bon état.
Sur l'emplacement occupé aujourd'hui par l'institution de l'Assomption (actuellement collège Feuchères) et une partie de l'avenue, se trouvait autrefois l'église de Saint-Jean de Jérusalem qui avait d'abord appartenu aux Templiers.
Il ne reste plus, que je sache, aucun vestige de ce monument.


Extrait de Nîmes et ses rues - Tome 1- Page 259-263 - de Albin Michel 1876.

NDLR : Le 11 novembre 1842 (1785-1857), l'avenue de la gare fut baptisée avenue Feuchères, du nom du Général-Baron Adrien-Victor Feuchères.
À ne pas confondre avec son homonyme, l'architecte départemental Léon Feuchère (1804-1857), qui réalisera, entre-autre, les plans de l'église Ste Perpétue ainsi que celui de la nouvelle Préfecture située avenue Feuchères.
Autre homonymes, Lucien-François Feuchère (1842-1904), fils de Léon et lui-même architecte départemental qui coréalisa avec Randon de Grolier le lycée de garçon (Daudet) et l’école Normale de filles, toujours à Nîmes.

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AVENUE FEUCHÈRES
Collection de Cartes Postales anciennes
de J.P. Descout - G. Taillefer - G. Mathon