LES CALVINISTES

DANS LA VALLEE DU RHONE.

 

Les dragonnades

 

3 versions, Pérussiis, Abbé J.A.G. et Petitalot.

 

Version 1 - Loys de Pérussiis - Des Guerres de la Comté de Venayscin et Provence, 1563

 

(1562). En ce lieu je descriray un incident qui ne sera pas mal convenable à ce discours. Qui est tel que, peu devant ceste expugnation d’Orange, son président, M. Parpaille, en estoit sorty une nuict avec quelques soldatz, conduisant mosquectz ou pétars, pouldres, cordages et aultres munitions de guerre, délibérant de surprendre le chasteau de Chasteauneuf de Pape et s’y fortifier et tenir, pour oster toutes les commodités à ceulx d’Avignon, en récompense des honneurs et dignités qu’il y avoit reccues.

 

Mais ceste sienne entreprinse fut vaine, car noz soldars là dedans mis par l’authorité de monseigneur révérendissime l’archevesque d’Avignon, comme membre sien, se défendirent sy bien que ledict Parpaille y brusla sa barbe et y laissa quelques uns des siens mortz, ensemble ses pièces et cordages, et honteusement se retira à Orange, ou peu après, suyvant tousjours nouvelles inventions, en voulcit aultant faire au lieu de Sainct-Laurens de Arbres, où il permit que l’église fut dépérie…

 

VERSION 2 - Le Pieux Pèlerin de N. D. de Grâce, de l’Abbé J. A. G., 1847.

 

(1562). Au mois d'août de l'année 1562, les hérétiques luthériens et calvinistes, ayant à leur tête le farouche baron des Adrets, se rendent maîtres de Roquemaure. Ils partent ensuite secrètement de cette ville et arrivent à Villeneuve auprès du fort qui commandait l'accès du pont Saint-Bénézet, dans l'intention de s'en emparer par surprise. Heureusement ces redoutables fanatiques, emportés par leur ardeur, brusquent une attaque, dans laquelle ils sont vivement repoussés par le célèbre florentin Scarfi, gouverneur du Languedoc, au nom de Charles IX, et laissent 35 hommes tués et autant de prisonniers.

 

Jean Calvin

 

Honteux de leur défaite, ils se retirent à la hâte, mettant à feu et à sang sur leur passage. Ne peut-on pas présumer qu’avant d’arriver devant saint Laurent des Arbres, où ils commirent des profanations et des cruautés dont le récit seul fait frémir d’horreur, et en passant presque sous la sainte Montagne, le baron des Adrets aura détaché quelques-uns de ses soldats, pour aller saccager une chapelle qui, à cette époque commençait à avoir quelques célébrité et était grandement vénérée par les populations des alentours?

 

Au reste, serait-il vrai que l’armée calviniste, repoussée des murs d’Avignon, n’eût point passé près de Rochefort, il est impossible que, cinq ans plus tard, en 1567, la sainte Chapelle ait échappé à une ruine presque totale. On sait que cette année fut vraiment désastreuse pour les catholiques.

 

Les villes d’Uzès, de Barjac, du Pont saint Esprit, de Bagnols, ainsi que les villages de Tresque, de Laudun, de saint Laurent des Arbres et enfin Rochefort, tombèrent au pouvoir des religionnaires, et eurent, pour la plupart, la douleur de voir leurs prêtres égorgés, souvent sur l’autel renversé, leurs églises profanées, brûlées, ruinées de fond en comble. A Rochefort, sans aucun doute, notre chapelle sera devenue l’objet sur lequel ces fanatiques auront, de préférence, fait tomber les coups de leur fureur sacrilège.

 

Quelle apparence en effet que des hérétiques, dont la rage de détruire avait certainement redoublé par les profanations dont ils s’étaient rendus coupables, aient épargné un lieu sacré pour les catholiques? Les insensés! Ils regardaient comme impie le culte que nous rendons à Marie et aux Saints! Aussi, la vue seule de cet objet vénéré dut-elle provoquer leur fureur.

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Le ciel nous est témoin que ce n’est qu’à regret que nous avonnouvelé la mémoire de ces tristes évènements. Oh! Puissent ceux d’entre nos frères séparés à qui il sera donné de parcourir ces lignes, comprendre enfin que la vérité ne se propage point au moyen de semblables violences!…

 

VERSION 3 - N.-D. de Rochefort, Le chanoine J. B. Petitalot, père Supérieur, 1910.

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(1567). Le sanctuaire de Rochefort était tout désigné à la rapacité et la fureur des réformateurs luthériens et calvinistes, aussi, à partir de 1560 jusque vers la fin du XVIe Siècle, ne cessa-t-il guère d’être profané, pillé, saccagé.

 

D’un côté, le farouche baron des Adrets, ce nouvel Attila dont le nom rappelle tans de massacres et de pillages, était accouru du Dauphiné, avait échoué devant les remparts d’Avignon, mais s’était emparé de Saint Laurent des Arbres, où il avait commis d’horribles cruautés, de Roquemaure et Châteauneuf du Pape, où il avait son quartier général.

 

D’un autre côté son digne émule Jacques de Crussol, surnommé Dacier, occupait Montfrin avec une forte garnison.

 

De ces deux centres, les Huguenots faisaient d’incessantes excursions dans toute la contrée, pillant, brûlant, ravageant les villes et les bourgs.

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Rochefort fut quelque temps protégé par son seigneur, Laurent d’Arpajon, vaillant guerrier, qui exerçait un commandement important dans les armées catholiques du Midi, et plus tard gouverneur de la ville d’Orange.

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Mais l’année 1567 fut tout spécialement désastreuse. Les villes d’Aramon, Beaucaire, Nîmes, sont prises; tous les environs sont livrés au pillage. Uzès, Bagnols, Viviers, Saze, Rochefort, Barjac, Montpellier, n’ont pas un meilleur sort leurs églises sont rasées ou saccagées, les prêtres et autres catholiques sont massacrés. Il en est de même dans trois cents autres villes, bourgs ou village, tombés aux mains des protestants.

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La haine qui les animait contre la Sainte Vierge et tout ce qui se rapportait à son culte, désignait particulièrement à leur sacrilège fureur la chapelle et tous les édifices de Notre Dame; tout fut profané.

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Les années suivantes, à plusieurs reprises, Rochefort fut encore ravagé. En 1570, par exemple, l’amiral de Coligny vint à Nîmes camper sous le château de Saint Privat, près du pont du Gard. Les villages de Saint Hilaire, Théziers et Bezouce, composés de catholiques éprouvèrent sa fureur à son arrivée; il y fit un massacre général, de sorte qu’ils restèrent tout à fait déserts. De là les soldats couraient les campagnes, pillant et brûlant les métairies, et tuant tous ceux qu’ils rencontraient. Ils s’emparèrent de Tresque, de Pujaut, des Angles, de Rochefort où ils s’établirent avec l’aide de quelques-uns des habitants qui étaient de leur religion.

 

Peu après ils furent repoussés par Henri de Montmorency; mais en 1575, les Calvinistes reprirent Rochefort, et obligèrent les habitants à contribuer à l’entretien de la garnison de Montfrin.

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Après tant d’assauts, l’ancienne église paroissiale et le château de Rochefort n’offraient guère que des ruines; pour en sauver les restes, les habitants invoquèrent la protection du roi et du maréchal de Montmorency, gouverneur du Languedoc.

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Quant au monastère de Notre Dame, livré sans défense au vandalisme des Huguenots, il fut renversé de fond en comble. Les religieux prirent la fuite, quelques-uns peut-être furent égorgés. La sainte chapelle demeura fortement endommagée, et si une partie de ses constructions résista aux efforts redoublés des démolisseurs, elle ne le dut sans doute qu’à son extrême solidité.

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