FRANÇOIS TRAUCAT

Chercheur de Trésor.

Par Albin Michel

Nîmes et ses rues, 1876

 

 

François Traucat, jardinier, natif de Nîmes, d'une famille protestante, se fondant paraît-il sur une prédiction de Nostradamus portant qu'un jardinier ferait fortune en découvrant un coq d'or, et ayant ouï dire qu'un aigle ou tout autre oiseau d'or était caché dans les fondements de la Tourmagne, s'était persuadé que c'était lui Traucat qui serait ce jardinier fortuné, en conséquence, il s'adressa au roi Henri IV pour obtenir l'autorisation de faire des fouilles. (1) Cette permission lui fut donnée par des lettres patentes datées de Fontainebleau de 22 mai 1601, mais sous les conditions suivantes :

 

« Les fouilles devaient se faire en présence du procureur du roi et de tel nombre de personnes qu'il jugerait à propos, tous les frais devaient être à la charge de Traucat et payés d'avance, et enfin, s'il trouvait un trésor quelconque, le tiers seul lui appartiendrait et les deux autres tiers seraient la propriété du roi. »

 

Traucat ne mit résolument à l’œuvre, mais après avoir dépensé beaucoup d'argent et remué beaucoup de terre, il dut renoncer à son entreprise, o'est à cette époque que se fit la grande excavation qu'on remarque encore aujourd'hui dans la partie basse du monument.

 

(1) V. Frossard, Nîmes et ses environs, t. 1, page 31.

 

FRANÇOIS TRAUCAT

Jardinier nîmois.

Par Albin Michel

Nîmes et ses rues, 1876

 

Traucat était un des plus habiles jardiniers de son siècle, mais ce qui l'a fait principalement connaître, c'est qu'il fut le premier qui mit en vogue le mûrier en France. Il commença d'en planter en 1564 et de toutes parts, on eut recours à lui pour se procurer un arbre si utile, aussi en 1606, il avait, dit-on, planté ou fait planter plus de quatre millions de mûriers tant en Provence qu'en Languedoc.

 

En 1606 il fit imprimer à Paria un traité portant le titre suivant :

 

« Discours abrégé, tant sur les vertus et propriétés des mûriers tant blancs que noirs, ayant petites meures blanches et petites noires, qui ont semblables feuilles, propres à nourrir les vers à soye ; et aussi s propres à servir, tant au corps humains qu'à faire beaux meubles et ustensiles de ménage. »

 

En attribuant à Traucat « la gloire » d'avoir le premier et le plus contribué à propager la culture du mûrier en France, il ne faudrait pas croire que cet arbre fut entièrement inconnu avant qu'il en fit l'objet de ses travaux; je trouve dans une biographie de Traucat faite par Ch. Vincent-Saint-Laurent (1) une note que je me fais un véritable plaisir de transcrire ici et qui porte :

 

« Quelques personnes assurent que le mûrier a été originairement apporté de l'Orient en Dauphiné par Guy Pape de Saint-Auban à son retour de la dernière croisade, d'autres le font introduire avant tout en Provence par les rois de Naples de la maison d'Anjou. Quoi qu'il en soit, en 1545, Rolland, sénéchal de Nîmes et de Beaucaire, envoya à la reine Jeanne de s Bourgogne, femme de Philippe-le-long, douze livres de soie du pays, de douze couleurs différentes, mais la nature même du y présent prouve combien la matière en était y alors précieuse et rare. Un siècle après, les s manufactures que Louis Xi tenta d'établir à Tours ne s'alimentèrent que de soies étrangères. Plus tard en 1570, Baïf, le poète, célébrait comme nue merveille l'éducation de quelques vers à soie dont s'amusait la sœur de François Ier, et Henri II fut le premier qui porta des bas de soie aux noces simultanées de sa fille et de sa sueur. Jusqu'alors, la culture du mûrier n'avait donc été qu'un objet de simple curiosité, concentré dans les jardins de quelques amateurs de choses rares. Elle n'a commencé à s'étendre dans le royaume que sous le règne de Charles IX, et c'est précisément l'époque à laquelle remontent les grandes plantations de Traucat. »

 

On peut se former rue idée de l'activité que dut déployer Traucat qui, pendant quarante-deux ans, vendit ou fit planter plus de quatre millions de mûriers, en voyant qu'en 1835, c'est-à-dire 229 ans après Traucat, le nombre de ces arbres ne s'élevait qu'à sept millions trois cent mille.

 

D'après M. Ernest Brunet de Lagrange, ce chiffre s'est élevé, en 1846, à quarante-six millions quatre cent mille.

 

Deux hommes peuvent donc revendiquer l'honneur d'avoir vulgarisé la culture du mûrier en France, l'un « François Traucat », de Nîmes, simple jardinier, cultivateur obscur, dont la mémoire s'eut à peine conservée dans les annales de sa ville natale, l'autre « Olivier de Serres », agronome illustre, écrivain célèbre, dont le souvenir intéresse la gloire nationale, qui est considéré comme le père de l'agriculture en France, et auquel on a élevé des statues.

 

Olivier de Serres, dans l'ouvrage qu'il publia et dédia au corps municipal de Paris, cite Nîmes comme ayant donné l'exemple d'attendre, d'être abondamment pourvu de mûriers avant d'entreprendre l'éducation des vers à soie, et il est reconnu qu'en 1854, pendant qu'Olivier de Serres faisait ses premiers essais au Pradel. Traucat avait déjà créé ses pépinières de mûriers.

 

« Ces faits consignés dans un panégyrique du mûrier composé par Traucat en 1868 et dont Henri IV accepta la dédicace, n'ont pas été démentis. Ils étaient avancée du vivant d'Olivier de Serres du temps de sa plus haute faveur auprès du prince ; comment y aurait-il laissé un autre s’approprier une gloire qu'il aurait eu le droit de revendiquer, et souffert sans réclamation qu'un prodiguât à un usurpateur la récompense due à ses services ? . »

 

Si j'ai insisté sur cette question de priorité, c'est que je tiens en historien fidèle à rendre à chacun la justice qui lui est due, et qu'en apprenant à mes concitoyens, les mérites ignorés d'un des enfants de notre ville, je voudrais que notre municipalité reconnaissante payât sa dette en élevant à François Traucat une statue sur une de nos places publiques.

 

(1) V. à la Bibliothèque de la ville, n° 2967, t. 3.

 

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