LA RUE LE L'ASPIC.

 

de Albin Michel, 1876

 

Cette rue s'appelait autrefois rue des Epis, Ménard nous apprend (1) que c'est dans son périmètre que se trouvait, en 1480, la maison de Jean Nicot, notaire, père du célèbre Jean Nicot qui brilla au XVI° siècle et devint sous le règne de François II ambassadeur de France en Portugal.

 

(1) Voir Ménard, tome 3, page 236.

 

Le nom des Epis fut dénaturé plus tard en celui de rue de l'Espic, ainsi qu'on en voit encore la mention gravée à l'angle de la maison Arnaud, au coin de la rue de Bernis, et c'est par simple corruption qu'on en a fait le nom actuel de rue de l’Aspic.

 

Cette rue qui n'a plus qu'un seul nom en avait autrefois plusieurs; depuis les Arènes jusqu'au coin de la rue de la Violette elle s'appelait rue des Quatre Jambes. Ce nom lui venait de ce que dans l'impasse de la maison Jalaguier ayant appartenu autrefois à M. Massip, avocat du Roi, on voit incrustée dans le mur une statue de pierre de forme bizarre que le vulgaire appelle l'homme des quatre jambes. Elle représente de la ceinture en bas deux corps humains au-dessus de la grandeur naturelle avec des sexes de femme; la poitrine semble couverte d'une draperie d'où l'on voit sortir une forme de bras; elle n'a qu'une tête avec une longue barbe.

 Poldo d'Albenas considérant cette figure par l'extrémité, depuis la ceinture en bas (1), l'a prise pour la représentation da Géryon de la fable qui fut défait en Espagne par Hercule ; il suppose qu'elle avait trois tètes, trois corps, six pieds, six jambes et six mains, et il lui donne un sexe masculin. Gaillard Guiran a commis la même erreur (2).

 Cette statue n'est qu'un mauvais assemblage de trois parties qui n'ont aucun rapport entre elles. La tête n'eut pas du corps de l'ouvrage, elle a été placée après coup pour donner à la statue une figure d'homme; cette tête même, a appartenu à une autre statue; la poitrine est une base de colonne qui a été aussi posée après coup. Le ventre et les jambes proviennent d'un autre fragment de statue â double corps. Cette dernière partie seule mérite quelque attention.

 

C'est là sans contredit le fragment d'une autre statue cariatide, comme il fallait vraisemblablement à l’édifice auquel elle fut employée plus de force qu'à l'ordinaire dans les colonnes destinées à en supporter l'entablement, l'architecte imagina ces deux figures qui formaient une double statue, plus propre par conséquent à supporter le fardeau d'un établissement plus considérable que les autres. Ce qui manque du reste du corps aura été détruit été perdu (3).

 

(1) Voir Poldo d'Albenas, chapitre 19, page 91.

(2) Gaillard Guiran, antiquités Nimes m. 3, lib. 2, éop. .

(3) Voir Ménard, tome 7, page 201.

 

 

 

On voit encore dans la même rue à l'angle de la rue de la Violette, un marbre blanc représentant un aigle traînant parle bec des festons de laurier et de chêne chargés de fleurs et de fruits. Il parait qu'on en avait trouvé plusieurs semblables dans les ruines des anciens édifices construits sur les terrains voisins du palais de justice, ils servaient probablement d'ornements au frontispice ou sur la frise de quelque superbe monument. Ces fragments étaient tous semblables, de grandeur naturelle, et tous sans têtes. On suppose que ce sont les Visigoths, ennemis du nom Romain, qui auraient commis ces mutilations, d'autres pensent que c'est Charles-Martel qui en brûlant les Arènes détruisit l'édifice voisin auquel ces aigles servaient d'ornement.

 

Un peu plus loin et à l'angle de la rue de l'Hôtel-de-Ville, on voit encore au 1°' étage d'une maison une petite colonne supportant une guirlande de fleurs, le tout d'un travail assez délicat; l'origine en pourrait bien être la même.

 

Au moyen Age, la partie de cette rue, comprise depuis le coin de la rue de la Violette jusqu'à la place de la rue de l'Aspic, s'appelait rue Malestrenne et dans la partie supérieure, jusqu'à la rue de la Madeleine, elle portait le nom de rue de la Pelissurie.

 

Le nom de Mal-estrenne se rencontre dans plusieurs villes et semble indiquer le danger qu'elle pouvait offrir aux passants, comme les rues Vide-Gousset, Caguensol, etc., etc.

 

A l'extrémité de la rue en face de la statue des Quatre Jambes, Rulman dit qu'il y avait une hôtellerie qui avait des balances pour enseigne, ce qui s'expliquerait par le voisinage du poids public qui se trouvait dans la rue de la Romaine, rue détruite aujourd'hui, mais qui se trouvait derrière le marché couvert, sur l'emplacement qu'occupe aujourd'hui la pharmacie Defferre.

 

Maison de Massip - Tableau collection Musée du Vieux-Nîmes

 

Dans l'ancienne maison de M. Massip, avocat du roi (maison Jalaguier), on a trouvé différentes inscriptions romaines, dont on trouve la description dans Ménard.

 

Voici les principales :

 

D.  M.

SEX. IVL. MESSIANI

SEX. ILL. DION’SIVS

FILIO PIISSIMO

ET SIBI. V. P.

 

 

 

 

 

SEX GRANIO SEX. F. VOL

*BOVDO

ET DICETONI MATRI

 

 

D. M.

D. PASSON PA

TERNI SEX. PAR

SON PATERNVS

PATRI OPTIMO

ET SEVERIA SE

VERINA MARI

TO RARISSIMO

 

 

D. M

VALERIAE MVNA

TIAE L. MVNATIVS

TITVLLVS SORORI

ET MVNATIA MAR

CELLA AVIÆ

 

L. IVILIO Q. F. VOL

NIGRO

AVRELIO SERVATO

OMNIB. HONORIB.

IN COLONIA SVA

FVNCTO

IIIIII VIRI CORORAT.

NEMAVSENSES

PATRONO

EX POSTVLATIONE POTV.

L.  D.  D.  D.

 

Voici l'explication que Ménard donne de cette dernière inscription :

 

L. Julius Niger en l'honneur de qui fut érigé ce monument, avait passé par toutes les charges honorables de sa colonie, et par là jouissait de la plus grande considération. Il paraît que cette colonie était la ville de Nîmes. Le mot abrégé vol., c'est-à-dire Voltinia tribu, qui était la tribu de Nîmes, donne lieu de le conjecturer. PATRONO. Ce citoyen distingué était le patron ou le protecteur des Sexvirs de Nîmes. Tel était l'usage des divers collèges, de se choisir des personnes illustres et puissantes par leur crédit pour leur servir de patrons.

 

EX POSTVLATIONE. POPVLI. Ce fut à la prière des habitants de Nimes que la corporation des Sexvirs augustaux consacra ce monument à son protecteur.

 

Locus Decreto Decurionum Datus. Cette formule qui revient souvent sur les monuments lapidaires, était employée pour marquer que le terrain où l'on érigeait le monument avait été assigné par les décurions.

 

Extrait de Nîmes et ses rues de Albin Michel, page 50 à 55 - Edition Clavel, Nîmes, 1876.

 
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