L'ARRONDISSEMENT D'UZES AVANT L'HISTOIRE.

DOCTEUR PAUL RAYMOND, 1900.

 

EXTRAITS

L'arrondissement d'Uzès comprend 8 cantons et 99 communes. Dans chacun de ces cantons et dans la plupart de ces communes, nous avons pu recueillir sur la longue suite des temps préhistoriques des documents importants, qui montrent que cette partie du Languedoc a été occupée par une population nombreuse, depuis les temps les plus reculés. Ce sont ces documents qu'il importe d'analyser tout d'abord, pour les grouper ensuite et en tirer les enseignements qu'ils comportent.

 

Canton de Pont-Saint-Esprit.

 

Ce canton est le premier de l'arrondissement quant à l'étendue (24.170 hectares). Il comprend les 16 communes suivantes : 

Aiguèze, Carsan, Cornillon, le Garn, Goudargues, Issirac, Laval, Montclus, Pont-Saint-Esprit, Saint Alexandre, Saint-André-de-Roquepertuis, Saint-Christol-de-Rodières, Saint-Julien-de-Peyrolas, Saint-Laurent-de-Carnols, Saint-Paulet-de-Caisson, Salazac.

Le canton de Pont-Saint-Esprit doit à la diversité des assises géologiques qui le composent et aux trois cours d'eau qui l'enserrent, l'Ardèche au nord, la Cèze au sud et le Rhône à l'est, d'être l'un des plus riches de l'arrondissement, Les qualités du soi, sa fertilité et son adaptation aux différentes cultures ont dû tenter les descendants de ces hommes de la Madeleine, qui avaient eux-mêmes trouvé dans les forêts des Causses, dans les grottes si nombreuses du terrain néocomien, ce qu'ils considéraient avant tout dans un pays, un gibier abondant et un asile sûr. Aussi ne faut-il pas s'étonner que depuis la plus haute antiquité l'homme ait habité cette partie du Gard. Les populations du Moustier, de la Madeleine, y ont laissé des traces de leur passage : les Néolithiques y ont été nombreux et ils y ont édifié des monuments qui attestent le degré de civilisation auquel ils étaient arrivés. Jusqu'à la conquête romaine, les vestiges du sol nous montrent le développement de nos ancêtres dans cette partie du Bas-Languedoc.

Le canton de Pont-Saint-Esprit peut donc être considéré par le palethnologue comme l'un des plus importants qui soient en France, Nous trouvons dans ses alluvions quaternaires des gisements moustériens ; dans les cavernes des vastes solitudes néocomiennes qui constituent les causses, des campements magdaléniens; sur des plateaux sablonneux dominant de multiples cours d'eau, des stations néolithiques; sur le causse, des mégalithes et parmi les sépultures dolméniques, nous relevons les traces des populations qui ont habité le pays aux. âges des métaux.

Un seul canton celui de Remoulins, nous donnera la reproduction de ce que nous constatons dans le canton de Pont-Saint-Esprit et nous verrons que les conditions géologiques dans lesquelles il se trouve, sont sensiblement les mêmes que pour ce dernier. A de semblables conditions de vie, réglées par la nature même du soi, devait répondre une civilisation identique et, sauf variations de détail, nous la retrouverons en effet.

 

Canton d'Uzès.

 

Ce canton est le deuxième de l'arrondissement, quant à l'étendue (23.300 hectares). Il comprend les 15 communes suivantes : 

Aigaliers, Arpaillargues et Aureillac, Blauzac, la Capelle et Masmolène, Maux, Montaren, Saint-Hippolyte-de-Montaigu, Saint-Maximin, Saint-Quentin, Saint-Siffret, Saint-Victor-des-Oules, Sanilhac et Sagriès, Serviers-et-Labaume, Uzès, Vallabrix.

Contrastant avec le précédent, le canton d'Uzès lie nous a pas livré de bien nombreux documents sur les temps préhistoriques. Constitué dans sa presque totalité par la formation miocène qui no se prêtait guère, il faut le reconnaître, à un habitat prolongé, le canton d'Uzès n'atteint que par son extrémité sud une toute petite partie du canon du Gardon, et là précisément, nous rencontrons une grotte intéressante, la grotte de Saint-Vérédème, occupée par une tribu néolithique de civilisation assez avancée, semble-t-il. Dans ce canton, les causses font défaut; nous ne pouvons donc espérer y rencontrer les cavernes qui ont servi de refuge, les mégalithes que la molasse miocène n'eût pas permis d'édifier, et si nous trouvons dans la partie la plus méridionale du canton le menhir de Sanilhac, il ne faut pas oublier que nous sommes déjà sur les roches infra crétacées solides et résistantes. Nous ne pouvions guère trouver dans ce canton que des stations à l'air libre, sur les plateaux qui dominent les vallées d'érosion de la série miocène et nous verrons qu'elles y existent.

 

Canton de Bagnols.

 

Ce canton est le troisième de l'arrondissement, quant à l'étendue (22.446 hectares). Il comprend les 17 communes suivantes : 

Bagnols, Cavillargues, Chusclan, Codolet, Connaux, Gaujac, Orsan, le Pin, la Roque, Sabran Saint-Etienne-des-Sorts, Saint-Gervais, Saint-Michel-d'Euzet, Saint-Nazaire, Saint-Pons-la-Calm, Tresques, Vénéjan.

Sans grand intérêt au point de vue de la palethnologie, le canton de Bagnols a été surtout occupé à l'époque néolithique par une population relativement nombreuse qu'avaient attirée les deux rivières qui traversent le canton dans toute sa longueur : la Cèze au nord, la Tave au midi. Sur les pentes méridionales qui dominent ces cours d'eau, les stations ne manquent pas, mais elles sont, à vrai dire, peu développées, comme si, malgré les avantages de la rivière, les sables et les terrains arides de la formation crétacée qui composent cette partie du territoire uzétien, ne se fussent pas prêtés à l'évolution de ces tribus.

Mention doit être faite, pourtant, d'un genre de monuments préhistoriques assez rares dans le Gard, semble t il, et largement représentés dans l'arrondissement d'Uzès. Ce sont les tumulus que nous rapportons à l'époque dit bronze: le premier tumulus appartient au canton de Bagnols et il constitue le premier anneau d'une chaîne qui s'étend à l'ouest dans les cantons voisins de Lussan et de Saint-Chaptes. Ces populations qui ont laissé des traces de leur passage dans toute la vallée du Rhône, avaient évidemment remonté le cours de la Tave.

 

Canton de Lussan.

 

Ce canton est le quatrième de l'arrondissement, quant à l'étendue ( 19.806 hectares). Il comprend les 12 communes suivantes : 

Belvezet, la Bastide d'Engras, la Bruguière, Fons-sur-Lussan, Fontarèche, Lussan, Pougnadoresse, Saint-André-d'Olérargues, Saint-Laurent-la-Vernède, Saint-Marcel-de-Careiret, Valérargues, Verfeuil.

Le canton de Lussan peut être proposé comme l'un des exemples les pins manifestes des relations qui existent entre la nature des terrains et les conditions qui, de tout temps, ont. guidé les hommes dans le choix de leur résidence, comme l'un des exemples, en un mot, des rapports étroits qui unissent la géologie et la palethnologie. Limite extrême vers la vallée du Rhône des mers secondaires (étage barrémien), le canton do Lussan est bordé par les terrains immédiatement supérieurs de la série infra et médio-crétacée. Les marnes aptiennes, les sables du gault, les calcaires cénomaniens, s'étagent dans toute la partie orientale du canton. Aux déserts des Causses crevassés qui s'étendent à l'ouest, font donc suite, à l'est, les fraîches vallées que l'on est sûr de rencontrer partout où s'étendent les sables du gault.

Sur les Causses, nous trouverons donc les mégalithes, dolmens et menhirs, les grottes qui dominent les crevasses et dans lesquelles il est possible de recueillir des vestiges néolithiques, bien qu'on moindre abondance toutefois, que dans les cavernes qui dominent les grandes failles de l'Ardèche ou du Gardon. Sur les pentes sablonneuses et le long des vallées, nous retrouvons, comme partout, les nombreuses stations néolithiques dont certaines, celle de la Bastide d'Engras, par exemple, ont une réelle importance.

 

Canton de Saint-Chaptes.

 

Ce canton est le cinquième de l'arrondissement, quant à l'étendue (17.711 hectares). Il comprend les 16 communes suivantes: 

Aubussargues, Baron, Bourdic, la Calmette, Collorgues, Dions, Foissac, Garrigues et Sainte-Eulalie, Montignargues, Moussac, la Rouvière, Sainte-Anastasie, Saint-Chaptes, Saint-Dézery, Saint-Geniès-de-Malgoirès, Sauzet.

 Le canton de Saint-Chaptes est, après celui de Pont-Saint-Esprit, le plus riche en vestiges préhistoriques, non qu'ils y soient aussi nombreux, mais par le fait de leur intérêt tout particulier. C'est dans ce canton que se trouve la crypte de Collorgues. C'est là aussi que se trouvent les grottes Saint-Joseph, Latrone, etc., les riches stations, de Collorgues, Aubussargues, dont l'industrie est toute spéciale. Il est rare de trouver des stations aussi riches ; l'industrie y est aussi bien particulière. C'est dans ce canton que se trouvent les principaux gisements de l'âge du cuivre, de cette époque durfortienne pour mieux dire, que l'ensemble des grottes du Gardon permet si bien d'étudier. C'est dans ces stations que l'on trouve la forme spéciale du grattoir de Collorgues. Les pointes de flèche en fouilles de saule on en amande y abondent, remarquables aussi par leur finesse et la perfection de leurs retouches. C'est là une industrie toute localisée qui est peut-être la caractéristique d'une tribu, mais qui nous paraît occuper dans le néolithique une place à part.

Lorsque, sortant d'Uzès, on se dirige vers l'ouest, on rencontre, après avoir franchi le ruisseau de Seynes, une immense cuvette, ancien lit de la mer tertiaire. A côté, vers l'ouest, la formation lacustre comprend la plus grande partie du canton de Saint-Chaptes. Elle est limitée au sud par les premières collines néocomiennes que va traverser le Gardon; à l'est par la molasse miocène du canton d'Uzès et par des bandes aptiennes. An nord, l'aspect géologique est des plus intéressants : c'est une colline qui s'étend sur une longueur de 8 à 9 kilomètres de l'est à l'ouest, comprenant partie des territoires d'Arpaillargues, d'Aubussargues, de Collorgues. Ce sont plutôt des monticules d'une hauteur moyenne de 2200 mètres, séparés les uns des autres par de minuscules vallées d'érosion la plus importante d'entre ces solutions de continuité livrant passage an ruisseau de Bourdic. Les pentes méridionales de ces plateaux appartiennent à la formation lacustre : les plateaux et surtout les pentes septentrionales sont de la formation du gault surmontant les marnes aptiennes. Cet adossement des deux formations limite les rivages de la mer tertiaire. Tout autour de ces plateaux, les sources et les ruisseaux abondent. Aussi ne faut-il pas s'étonner que ces plateaux aient servi de demeure aux populations néolithiques. Nombreuses et riches sont, en effet, les stations que l'on y rencontre.

 

Canton de Roquemaure :

 

Ce canton est le sixième de l'arrondissement quant à l'étendue (15.846 hectares). Il comprend les 9 communes suivantes 

Laudun, Lirac, Montfaucon, Roquemaure, Saint-Geniès de Comolas, Saint-Laurent-des-Arbres, Saint-Victor-la-Coste, Sauveterre, Tavel.

 En grande partie constitué par les alluvions anciennes du Rhône, ce canton ne pouvait nous donner de bien nombreux vestiges préhistoriques. Seuls les terrains anciens qui émergeaient des rivages des mers tertiaires, présentaient des anfractuosités qui ont été habitées par l'homme et quelques plateaux qui lui ont servi de refuge.

 

Canton de Remoulins.

 

Ce canton est le septième de l'arrondissement quant à l'étendue (14.132 hectares). Il comprend les 9 communes suivantes :

Argilliers, Castillon-du-Gard, Collias, Fournès, Pouzilliac, Remoulins, Saint-Hilaire-d'Ozilhan, Valliguières, Vers.

 Bien connu des palethnologues, grâce aux savantes et fructueuses recherches de M. Cazalis de Fondouce, le canton de Remoulins compte parmi ses gisements les grottes célèbres de la Salpêtrière et de la Sartanette. Pendant la longue série de siècles qui s'étend entre l'époque de la Madeleine et l'occupation romaine, le canton de Remoulins n'a cessé d'être habité, et depuis la grotte paléolithique de la Salpêtrière, jusqu'aux cachettes du bronze, en passant par les grottes néolithiques du Gardon, on n'y trouve que des gisements du plus haut intérêt. 

Par sa situation, par sa constitution géologique, le canton de Remoulins, mieux que tout autre, se prêtait à une habitation continue de populations qui, trouvant une vie facile en cette région, devaient s'y développer et y prospérer.

 A proximité des plaines du Rhône, traversé par le Gardon, l'un des principaux affluents du fleuve dans cette partie du bas Languedoc, le canton de Remoulins offrait à des tribus sédentaires la fertilité de ses alluvions sablonneuses, comme il avait offert aux populations nomades des temps paléolithiques, les forêts de ses causses et le précieux abri de ses grottes nombreuses étagées le long de la rivière.

 C'est donc ces dernières qu'il semblait, logique d'interroger et, de fait, l'attente n'a pas été déçue ; elles nous ont apporté les plus riches documents. la paIethnologie du canton de Remoulins est tout entière dans ses grottes. Elles pourraient servir de type à une description lion pas régionale, mais visant l'ensemble de notre pays, au même titre que les grottes du Périgord, par exemple. Aussi bien dans les grottes néolithiques que dans la grotte paléolithique de la Salpêtrière, c'est l'industrie la plus caractéristique que l'on rencontre.

 

 Canton de Villeneuve-lès-Avignon.

 

Ce canton est le plus petit de l'arrondissement (10.647 hectares). Il comprend les 5 communes suivantes : 

les Angles, Pujaut, Rochefort, Saze, Villeneuve-lès-Avignon.

C'est aussi Ie plus pauvre en vestiges préhistoriques. Les marnes et les sables du pliocène qui composent la majeure partie du canton, se prêtaient mal à un séjour prolongé de l'homme et à la conservation des traces de son passage. Aussi n'est-ce guère que sur les bords mêmes du Rhône, que l'on rencontre ces vestiges du passé, en quelques rares stations occupées par des familles de pêcheurs pauvres et d'une civilisation bien rudimentaire, à en juger par les trouvailles que nous y avons faites. 

 A Villeneuve se trouvent pourtant,


L'ARRONDISSEMENT D'UZES AVANT L'HISTOIRE.

DOCTEUR PAUL RAYMOND, 1900.

 

EXTRAITS

L'arrondissement d'Uzès comprend 8 cantons et 99 communes. Dans chacun de ces cantons et dans la plupart de ces communes, nous avons pu recueillir sur la longue suite des temps préhistoriques des documents importants, qui montrent que cette partie du Languedoc a été occupée par une population nombreuse, depuis les temps les plus reculés. Ce sont ces documents qu'il importe d'analyser tout d'abord, pour les grouper ensuite et en tirer les enseignements qu'ils comportent.

 

Canton de Pont-Saint-Esprit.

 

Ce canton est le premier de l'arrondissement quant à l'étendue (24.170 hectares). Il comprend les 16 communes suivantes : 

Aiguèze, Carsan, Cornillon, le Garn, Goudargues, Issirac, Laval, Montclus, Pont-Saint-Esprit, Saint Alexandre, Saint-André-de-Roquepertuis, Saint-Christol-de-Rodières, Saint-Julien-de-Peyrolas, Saint-Laurent-de-Carnols, Saint-Paulet-de-Caisson, Salazac.

Le canton de Pont-Saint-Esprit doit à la diversité des assises géologiques qui le composent et aux trois cours d'eau qui l'enserrent, l'Ardèche au nord, la Cèze au sud et le Rhône à l'est, d'être l'un des plus riches de l'arrondissement, Les qualités du soi, sa fertilité et son adaptation aux différentes cultures ont dû tenter les descendants de ces hommes de la Madeleine, qui avaient eux-mêmes trouvé dans les forêts des Causses, dans les grottes si nombreuses du terrain néocomien, ce qu'ils considéraient avant tout dans un pays, un gibier abondant et un asile sûr. Aussi ne faut-il pas s'étonner que depuis la plus haute antiquité l'homme ait habité cette partie du Gard. Les populations du Moustier, de la Madeleine, y ont laissé des traces de leur passage : les Néolithiques y ont été nombreux et ils y ont édifié des monuments qui attestent le degré de civilisation auquel ils étaient arrivés. Jusqu'à la conquête romaine, les vestiges du sol nous montrent le développement de nos ancêtres dans cette partie du Bas-Languedoc.

Le canton de Pont-Saint-Esprit peut donc être considéré par le palethnologue comme l'un des plus importants qui soient en France, Nous trouvons dans ses alluvions quaternaires des gisements moustériens ; dans les cavernes des vastes solitudes néocomiennes qui constituent les causses, des campements magdaléniens; sur des plateaux sablonneux dominant de multiples cours d'eau, des stations néolithiques; sur le causse, des mégalithes et parmi les sépultures dolméniques, nous relevons les traces des populations qui ont habité le pays aux. âges des métaux.

Un seul canton celui de Remoulins, nous donnera la reproduction de ce que nous constatons dans le canton de Pont-Saint-Esprit et nous verrons que les conditions géologiques dans lesquelles il se trouve, sont sensiblement les mêmes que pour ce dernier. A de semblables conditions de vie, réglées par la nature même du soi, devait répondre une civilisation identique et, sauf variations de détail, nous la retrouverons en effet.

 

Canton d'Uzès.

 

Ce canton est le deuxième de l'arrondissement, quant à l'étendue (23.300 hectares). Il comprend les 15 communes suivantes : 

Aigaliers, Arpaillargues et Aureillac, Blauzac, la Capelle et Masmolène, Maux, Montaren, Saint-Hippolyte-de-Montaigu, Saint-Maximin, Saint-Quentin, Saint-Siffret, Saint-Victor-des-Oules, Sanilhac et Sagriès, Serviers-et-Labaume, Uzès, Vallabrix.

Contrastant avec le précédent, le canton d'Uzès lie nous a pas livré de bien nombreux documents sur les temps préhistoriques. Constitué dans sa presque totalité par la formation miocène qui no se prêtait guère, il faut le reconnaître, à un habitat prolongé, le canton d'Uzès n'atteint que par son extrémité sud une toute petite partie du canon du Gardon, et là précisément, nous rencontrons une grotte intéressante, la grotte de Saint-Vérédème, occupée par une tribu néolithique de civilisation assez avancée, semble-t-il. Dans ce canton, les causses font défaut; nous ne pouvons donc espérer y rencontrer les cavernes qui ont servi de refuge, les mégalithes que la molasse miocène n'eût pas permis d'édifier, et si nous trouvons dans la partie la plus méridionale du canton le menhir de Sanilhac, il ne faut pas oublier que nous sommes déjà sur les roches infra crétacées solides et résistantes. Nous ne pouvions guère trouver dans ce canton que des stations à l'air libre, sur les plateaux qui dominent les vallées d'érosion de la série miocène et nous verrons qu'elles y existent.

 

Canton de Bagnols.

 

Ce canton est le troisième de l'arrondissement, quant à l'étendue (22.446 hectares). Il comprend les 17 communes suivantes : 

Bagnols, Cavillargues, Chusclan, Codolet, Connaux, Gaujac, Orsan, le Pin, la Roque, Sabran Saint-Etienne-des-Sorts, Saint-Gervais, Saint-Michel-d'Euzet, Saint-Nazaire, Saint-Pons-la-Calm, Tresques, Vénéjan.

Sans grand intérêt au point de vue de la palethnologie, le canton de Bagnols a été surtout occupé à l'époque néolithique par une population relativement nombreuse qu'avaient attirée les deux rivières qui traversent le canton dans toute sa longueur : la Cèze au nord, la Tave au midi. Sur les pentes méridionales qui dominent ces cours d'eau, les stations ne manquent pas, mais elles sont, à vrai dire, peu développées, comme si, malgré les avantages de la rivière, les sables et les terrains arides de la formation crétacée qui composent cette partie du territoire uzétien, ne se fussent pas prêtés à l'évolution de ces tribus.

Mention doit être faite, pourtant, d'un genre de monuments préhistoriques assez rares dans le Gard, semble t il, et largement représentés dans l'arrondissement d'Uzès. Ce sont les tumulus que nous rapportons à l'époque dit bronze: le premier tumulus appartient au canton de Bagnols et il constitue le premier anneau d'une chaîne qui s'étend à l'ouest dans les cantons voisins de Lussan et de Saint-Chaptes. Ces populations qui ont laissé des traces de leur passage dans toute la vallée du Rhône, avaient évidemment remonté le cours de la Tave.

 

Canton de Lussan.

 

Ce canton est le quatrième de l'arrondissement, quant à l'étendue ( 19.806 hectares). Il comprend les 12 communes suivantes : 

Belvezet, la Bastide d'Engras, la Bruguière, Fons-sur-Lussan, Fontarèche, Lussan, Pougnadoresse, Saint-André-d'Olérargues, Saint-Laurent-la-Vernède, Saint-Marcel-de-Careiret, Valérargues, Verfeuil.

Le canton de Lussan peut être proposé comme l'un des exemples les pins manifestes des relations qui existent entre la nature des terrains et les conditions qui, de tout temps, ont. guidé les hommes dans le choix de leur résidence, comme l'un des exemples, en un mot, des rapports étroits qui unissent la géologie et la palethnologie. Limite extrême vers la vallée du Rhône des mers secondaires (étage barrémien), le canton do Lussan est bordé par les terrains immédiatement supérieurs de la série infra et médio-crétacée. Les marnes aptiennes, les sables du gault, les calcaires cénomaniens, s'étagent dans toute la partie orientale du canton. Aux déserts des Causses crevassés qui s'étendent à l'ouest, font donc suite, à l'est, les fraîches vallées que l'on est sûr de rencontrer partout où s'étendent les sables du gault.

Sur les Causses, nous trouverons donc les mégalithes, dolmens et menhirs, les grottes qui dominent les crevasses et dans lesquelles il est possible de recueillir des vestiges néolithiques, bien qu'on moindre abondance toutefois, que dans les cavernes qui dominent les grandes failles de l'Ardèche ou du Gardon. Sur les pentes sablonneuses et le long des vallées, nous retrouvons, comme partout, les nombreuses stations néolithiques dont certaines, celle de la Bastide d'Engras, par exemple, ont une réelle importance.

 

Canton de Saint-Chaptes.

 

Ce canton est le cinquième de l'arrondissement, quant à l'étendue (17.711 hectares). Il comprend les 16 communes suivantes: 

Aubussargues, Baron, Bourdic, la Calmette, Collorgues, Dions, Foissac, Garrigues et Sainte-Eulalie, Montignargues, Moussac, la Rouvière, Sainte-Anastasie, Saint-Chaptes, Saint-Dézery, Saint-Geniès-de-Malgoirès, Sauzet.

 Le canton de Saint-Chaptes est, après celui de Pont-Saint-Esprit, le plus riche en vestiges préhistoriques, non qu'ils y soient aussi nombreux, mais par le fait de leur intérêt tout particulier. C'est dans ce canton que se trouve la crypte de Collorgues. C'est là aussi que se trouvent les grottes Saint-Joseph, Latrone, etc., les riches stations, de Collorgues, Aubussargues, dont l'industrie est toute spéciale. Il est rare de trouver des stations aussi riches ; l'industrie y est aussi bien particulière. C'est dans ce canton que se trouvent les principaux gisements de l'âge du cuivre, de cette époque durfortienne pour mieux dire, que l'ensemble des grottes du Gardon permet si bien d'étudier. C'est dans ces stations que l'on trouve la forme spéciale du grattoir de Collorgues. Les pointes de flèche en fouilles de saule on en amande y abondent, remarquables aussi par leur finesse et la perfection de leurs retouches. C'est là une industrie toute localisée qui est peut-être la caractéristique d'une tribu, mais qui nous paraît occuper dans le néolithique une place à part.

Lorsque, sortant d'Uzès, on se dirige vers l'ouest, on rencontre, après avoir franchi le ruisseau de Seynes, une immense cuvette, ancien lit de la mer tertiaire. A côté, vers l'ouest, la formation lacustre comprend la plus grande partie du canton de Saint-Chaptes. Elle est limitée au sud par les premières collines néocomiennes que va traverser le Gardon; à l'est par la molasse miocène du canton d'Uzès et par des bandes aptiennes. An nord, l'aspect géologique est des plus intéressants : c'est une colline qui s'étend sur une longueur de 8 à 9 kilomètres de l'est à l'ouest, comprenant partie des territoires d'Arpaillargues, d'Aubussargues, de Collorgues. Ce sont plutôt des monticules d'une hauteur moyenne de 2200 mètres, séparés les uns des autres par de minuscules vallées d'érosion la plus importante d'entre ces solutions de continuité livrant passage an ruisseau de Bourdic. Les pentes méridionales de ces plateaux appartiennent à la formation lacustre : les plateaux et surtout les pentes septentrionales sont de la formation du gault surmontant les marnes aptiennes. Cet adossement des deux formations limite les rivages de la mer tertiaire. Tout autour de ces plateaux, les sources et les ruisseaux abondent. Aussi ne faut-il pas s'étonner que ces plateaux aient servi de demeure aux populations néolithiques. Nombreuses et riches sont, en effet, les stations que l'on y rencontre.

 

Canton de Roquemaure :

 

Ce canton est le sixième de l'arrondissement quant à l'étendue (15.846 hectares). Il comprend les 9 communes suivantes 

Laudun, Lirac, Montfaucon, Roquemaure, Saint-Geniès de Comolas, Saint-Laurent-des-Arbres, Saint-Victor-la-Coste, Sauveterre, Tavel.

 En grande partie constitué par les alluvions anciennes du Rhône, ce canton ne pouvait nous donner de bien nombreux vestiges préhistoriques. Seuls les terrains anciens qui émergeaient des rivages des mers tertiaires, présentaient des anfractuosités qui ont été habitées par l'homme et quelques plateaux qui lui ont servi de refuge.

 

Canton de Remoulins.

 

Ce canton est le septième de l'arrondissement quant à l'étendue (14.132 hectares). Il comprend les 9 communes suivantes :

Argilliers, Castillon-du-Gard, Collias, Fournès, Pouzilliac, Remoulins, Saint-Hilaire-d'Ozilhan, Valliguières, Vers.

 Bien connu des palethnologues, grâce aux savantes et fructueuses recherches de M. Cazalis de Fondouce, le canton de Remoulins compte parmi ses gisements les grottes célèbres de la Salpêtrière et de la Sartanette. Pendant la longue série de siècles qui s'étend entre l'époque de la Madeleine et l'occupation romaine, le canton de Remoulins n'a cessé d'être habité, et depuis la grotte paléolithique de la Salpêtrière, jusqu'aux cachettes du bronze, en passant par les grottes néolithiques du Gardon, on n'y trouve que des gisements du plus haut intérêt. 

Par sa situation, par sa constitution géologique, le canton de Remoulins, mieux que tout autre, se prêtait à une habitation continue de populations qui, trouvant une vie facile en cette région, devaient s'y développer et y prospérer.

 A proximité des plaines du Rhône, traversé par le Gardon, l'un des principaux affluents du fleuve dans cette partie du bas Languedoc, le canton de Remoulins offrait à des tribus sédentaires la fertilité de ses alluvions sablonneuses, comme il avait offert aux populations nomades des temps paléolithiques, les forêts de ses causses et le précieux abri de ses grottes nombreuses étagées le long de la rivière.

 C'est donc ces dernières qu'il semblait, logique d'interroger et, de fait, l'attente n'a pas été déçue ; elles nous ont apporté les plus riches documents. la paIethnologie du canton de Remoulins est tout entière dans ses grottes. Elles pourraient servir de type à une description lion pas régionale, mais visant l'ensemble de notre pays, au même titre que les grottes du Périgord, par exemple. Aussi bien dans les grottes néolithiques que dans la grotte paléolithique de la Salpêtrière, c'est l'industrie la plus caractéristique que l'on rencontre.

 

 Canton de Villeneuve-lès-Avignon.

 

Ce canton est le plus petit de l'arrondissement (10.647 hectares). Il comprend les 5 communes suivantes : 

les Angles, Pujaut, Rochefort, Saze, Villeneuve-lès-Avignon.

C'est aussi Ie plus pauvre en vestiges préhistoriques. Les marnes et les sables du pliocène qui composent la majeure partie du canton, se prêtaient mal à un séjour prolongé de l'homme et à la conservation des traces de son passage. Aussi n'est-ce guère que sur les bords mêmes du Rhône, que l'on rencontre ces vestiges du passé, en quelques rares stations occupées par des familles de pêcheurs pauvres et d'une civilisation bien rudimentaire, à en juger par les trouvailles que nous y avons faites. 

 A Villeneuve se trouvent pourtant, dans la station néolithique de la Seignourette, les seuls fonds de cabanes découverts jusqu'ici dans le Gard, et cette circonstance nous permet de placer le canton de Villeneuve parmi ceux qui nous ont apporté de précieux renseignements Pour la reconstitution des premiers temps de notre histoire.

On pouvait se demander si sur les bords des l'anciens étangs de Pujaut et de Rochefort, on trouverait des vestiges d'habitations lacustres, mais rien jusqu'ici n'est venu donner l'espérance de semblable découverte.

 

 

DOCTEUR PAUL RAYMOND

Publication Palethnologique sur La Grotte magdalénienne  de Jean-Louis ou de Chabot.

 

Aiguèze

 

A deux kilomètres en amont du village d'Aiguèze s'ouvre sur la rive droite de l'Ardèche, à 45 mètres au-dessus du lit habituel de la rivière, la grotte de Jean-Louis ou de Chabot. Cette grotte, qui a été explorée par plusieurs collectionneurs, est située à la partie terminale des gorges de l'Ardèche, en face de la grotte magdalénienne du Figuier que j'ai décrite ailleurs, mais qui, située sur la rive gauche de la rivière, dans le département de l'Ardèche, ne trouvera pas place, en conséquence, dans ce travail.

La grotte de Jean-Louis s'ouvre sous un rocher à pic, d'une trentaine de mètres de hauteur. Celui-ci forme avec le sol un angle rentrant, d'où une sorte d'abri qui précède la grotte proprement dite. L'abri sous roche, comme la grotte, ont été habités, mais, par suite de fouilles mai dirigées par des amateurs inexpérimentés, il est devenu à peu près impossible, de faire quelque trouvaille dans une grotte, qui a, d'ailleurs, été murée pour servir de bergerie. La grotte, orientée au N. E., a 30 mètres de longueur, 3m50 de largeur, 2m50 de hauteur.

Ainsi que je le disais, le sol de la grotte a été profondément remanié aussi bien par des amateurs que par le propriétaire de la grotte, qui, chaque année, enlève, le fumier du troupeau qu'il y enferme ; je n'ai trouvé pour ma part, au milieu de ces terres remaniées, que quelques silex d'une belle patine blanche, mélangés à des ossements de bœuf, de cheval et de renne. Mais les fouilleurs s'étant arrêtés à l'abri sous roche, j'ai pu, dans un sol vierge, pratiquer des fouilles dont voici la coupe intéressante :
1° Une couche de débris actuels, ces grottes servant d'abri, aujourd'hui encore, aux bergers de la région.

2° Une couche gallo-romaine : ces deux couches avant une épaisseur totale de 0m20 et caractérisées parles vestiges le  plus typiques. Dans la couche romaine, fut trouvée une monnaie de petit bronze à l'effigie de Constantin.

3° Une couche de pierres plates en calcaire néocomien, formation de la région. Cette couche peut être évaluée à 0m05 environ.

4° Une couche de cendres immédiatement au-dessous de la précédente. Même épaisseur.

5° La couche magdalénienne à silex et ossements, de 0m25.

6° Une deuxième couche de pierres plates d'environ 0m10.

7° Un dépôt d'argile sablonneuse, de 0m05 de puissance.

8° Le rocher ou sol naturel.

L'épaisseur totale de la fouille était donc de 0m70 environ.

Cette constatation d'une couche de pierres plates au-dessus du sol est d'un intérêt majeur. C'est la seule grotte, d'ailleurs, où j'aie pu relever une telle disposition. Nous verrons que dans une grotte sépulcrale (Trèsques), néolithique cette fois, les ossements reposaient sur une couche de pierres plates au-dessus de l'argile, nomme dans la grotte de Jean-Louis : il est curieux de rencontrer chez ces populations paléolithiques puis néolithiques, les mêmes errements. Dans la grotte de Jean-Louis, la raison eu est évidemment un filet d'eau qui, glissant sur l'argile du sol, devait le transformer en un véritable bourbier. Nous avons vu qu'au-dessus de la couche magdalénienne existait un foyer de cendres recouvert à son tour par une autre couche de pierres plates, mais on ne peut rapporter cette dernière couche à l'époque néolithique. À ce moment, la grotte de Jean-Louis n'a pas été habitée et je n'y ai trouvé ni un instrument de type néolithique, ni le moindre fragment de poterie. Il est vraisemblable que cette couche de pierrailles ne remonte qu'à l'époque gallo-romaine.

Les objets qui ont été recueillis à la grotte de Jean-Louis sont en silex profondément cacholonné : ce sont des lames allongées et souvent retouchées, des grattoirs, des racloirs, des burins, etc., qui suffiraient, par leur ensemble morphologique, à classer cette grotte parmi les magdaléniennes. Les ossements de renne viennent confirmer cette impression.

Ce sont d'abord des bois de renne, puis des mâchoires brisées en trois et quatre fragments, pour en extraire la moelle. Ainsi que le fit remarquer M. G. de Mortillet, lorsque je présentai ces pièces, à la Société d'Anthropologie (17 mars 1892), leur mode de cassure est tout spécial. Les Magdaléniens aimaient beaucoup sucer les matières muqueuses qui se trouvaient au-dessous des dents. Pour satisfaire leur goût, ils. cassaient toujours les maxillaires longitudinalement. On trouva aussi des canons de renne brisés dans la même intention, puis des os longs également brisés longitudinalement, et cela comme les canons et os longs trouvés dans la grotte de Soyons, dans l'Ardèche, par le Cte Lepic. Ce sont là encore les vestiges que j'ai trouvés dans la grotte magdalénienne, du Figuier, située en face de la grotte de Chabot, mais de l'autre côté de la rivière d'Ardèche, sur la rive gauche et dans le département de l'Ardèche par conséquent.

Ces grottes se complètent et elles ont été évidemment habitées par la môme population. J'ai fait ressortir le mélange, dans ces deux grottes, de pièces appartenant par leur morphologie aux époques moustérienne et magdalénienne, et si dans la grotte du Figuier, leur niveau respectif apparaissait, en un point du moins, assez distinct, on peut dire, cependant, d'une façon générale, qu'il s'agit d'une môme époque avec survivance de types industriels, et que cette époque est celle de la Madeleine.

Nous avons fait pour la grotte d'Oullins semblable remarque.

L'une des particularités les plus intéressantes de cette grotte, consiste en une série de traits gravés sur les parois et sur la nature desquels il est assez difficile de se prononcer. Je ne saurais mieux faire que de transcrire ici la note que j'avais présentée sur ces gravures à. la Société d'Anthropologie en 1896. Cette communication fut faite à l'occasion de la découverte par M Rivière de dessins gravés en creux sur les parois de la grotte de la Mouthe, dans la Dordogne. M. Rivière y avait reconnu la représentation d'animaux (bœuf et cheval) par des traits repassés on non à l'ocre, puis une série de stries sans signification apparente.

Il existe précisément, disais-je, sur les parois de la grotte Chabot, des gravures analogues. Je connaissais depuis longtemps ces gravures, bien connues aussi, d'ailleurs, des palethnologues de la région, mais, pas plus autrefois qu'aujourd'hui encore, je n'étais fixé sur leur valeur et leur date d'exécution. J'avais bien lu, dans la France préhistorique de M. Cartailhac, que « les parois de certaines grottes (sépulcrales artificielles) portent souvent une multitude de lignes dirigées sans ordre et dans tous les sens; qu'il y a quelquefois des traits réguliers qu'on pourrait considérer comme destinés à rappeler un nombre ou une série de faits ». Mais je ne sais à quelles grottes l'auteur a fait allusion. 

En 1889, M. Chiron, instituteur à Saint-Just-d'Ardèche, adressa à la Société d'Anthropologie de Lyon une note sur ces dessins. Il avait cru y reconnaître un arc tendu, des oiseaux et cinq ou six personnages enchevêtrés. Je n'y avais jamais rien vu de semblable et, en 1891, une délégation de l'Académie de Vaucluse à laquelle appartient notre collègue, M. Nicolas, n'y voyait rien de plus, à son tour, qu'une série de lignes gravées grossièrement, sans esprit de suite et d'assemblage bizarre. Il semble d'ailleurs que M. Chiron ait, dans la suite, jugé autrement des choses, car dans une publication postérieure, il est beaucoup moins explicite.

Ce sont, en somme, des traits gravés en creux, à une profondeur d'environ 0m005, que l'on trouve. Ces traits sont verticaux d'autres les viennent couper obliquement et sous des angles plus ou moins aigus, si bien qu'il en résulte de véritables hachures. En un point existe une étoile et il est étonnant qu'elle n'ait pas été signalée, car c'est réellement la figure la plus décisive. Certains de ces traits dépassent 0m50 de longueur. Il en est qui sont recouverts, comme à la Mouthe, d'une couche de stalactite.

Par qui ont été gravés ces traits curieux, car l'appellation de dessins serait bien prétentieuse?

Est-ce réellement par les hommes qui ont habité coite grotte à l'époque de la Madeleine?

Je ne sais. Tout ce que je puis dire, c'est que cette grotte a été habitée à l'époque magdalénienne, qu'elle ne semble pas l'avoir été pendant toute la période néolithique ; qu'elle l'a été de nouveau à l'époque gallo-romaine, ainsi qu'on témoignent les objets que j'y ai pu recueillir. Ce que je puis dire aussi, c'est qu'il a fallu un temps considérable pour exécuter ces gravures, car la dureté de cette roche néocomienne est extrême. Il est curieux de voir dans deux grottes magdaléniennes des gravures analogues et le rapprochement s'imposait. Je me garde bien de conclure, et ce n'est que comme pierre d'attente que je signale cette intéressante particularité.

Les découvertes récentes de MM. Rivière, Daleau, etc., m'ont engagé à étudier à nouveau. ces traits gravés, et je suis arrivé à penser que leur origine intentionnelle ne saurait être mise en doute.

Outre que ce sont les seuls que l'on trouve dans les nombreuses cavernes préhistoriques des gorges de l'Ardèche, il est impossible de les confondre avec de simples fissures du rocher. Il existe précisément vers le fond de la caverne quelques fissures qui permettent d'établir une comparaison. Dans une fissure, les arêtes sont vives, les deux lèvres sont comme taillées à l'emporte-pièce, et la pénétration dépasse le demi-centimètre qu'atteint à peine un trait gravé de la grotte. Dans ces gravures, les bords du trait ne sont plus à pie; ils sont mousses, comme taillés en dédolant. Ils vont en s'écartant de la partie profonde, comme si le grand angle ainsi formé résultait du passage réitéré d'un instrument épais terminé comme un burin par un angle trièdre, et qui aurait pénétré dans la roche à la façon d'un coin.

Il faut donc arriver à conclure que ces traits, qui nous paraissent informes ou dont nous ne comprenons pas le sens qu'ils ont eu, peut-être, sont bien de la main de l'homme.

 

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dans la station néolithique de la Seignourette, les seuls fonds de cabanes découverts jusqu'ici dans le Gard, et cette circonstance nous permet de placer le canton de Villeneuve parmi ceux qui nous ont apporté de précieux renseignements Pour la reconstitution des premiers temps de notre histoire.

On pouvait se demander si sur les bords des l'anciens étangs de Pujaut et de Rochefort, on trouverait des vestiges d'habitations lacustres, mais rien jusqu'ici n'est venu donner l'espérance de semblable découverte.

 

 

DOCTEUR PAUL RAYMOND

Publication Palethnologique sur La Grotte magdalénienne  de Jean-Louis ou de Chabot.

 

Aiguèze

 

A deux kilomètres en amont du village d'Aiguèze s'ouvre sur la rive droite de l'Ardèche, à 45 mètres au-dessus du lit habituel de la rivière, la grotte de Jean-Louis ou de Chabot. Cette grotte, qui a été explorée par plusieurs collectionneurs, est située à la partie terminale des gorges de l'Ardèche, en face de la grotte magdalénienne du Figuier que j'ai décrite ailleurs, mais qui, située sur la rive gauche de la rivière, dans le département de l'Ardèche, ne trouvera pas place, en conséquence, dans ce travail.

La grotte de Jean-Louis s'ouvre sous un rocher à pic, d'une trentaine de mètres de hauteur. Celui-ci forme avec le sol un angle rentrant, d'où une sorte d'abri qui précède la grotte proprement dite. L'abri sous roche, comme la grotte, ont été habités, mais, par suite de fouilles mai dirigées par des amateurs inexpérimentés, il est devenu à peu près impossible, de faire quelque trouvaille dans une grotte, qui a, d'ailleurs, été murée pour servir de bergerie. La grotte, orientée au N. E., a 30 mètres de longueur, 3m50 de largeur, 2m50 de hauteur.

Ainsi que je le disais, le sol de la grotte a été profondément remanié aussi bien par des amateurs que par le propriétaire de la grotte, qui, chaque année, enlève, le fumier du troupeau qu'il y enferme ; je n'ai trouvé pour ma part, au milieu de ces terres remaniées, que quelques silex d'une belle patine blanche, mélangés à des ossements de bœuf, de cheval et de renne. Mais les fouilleurs s'étant arrêtés à l'abri sous roche, j'ai pu, dans un sol vierge, pratiquer des fouilles dont voici la coupe intéressante :
1° Une couche de débris actuels, ces grottes servant d'abri, aujourd'hui encore, aux bergers de la région.

2° Une couche gallo-romaine : ces deux couches avant une épaisseur totale de 0m20 et caractérisées parles vestiges le  plus typiques. Dans la couche romaine, fut trouvée une monnaie de petit bronze à l'effigie de Constantin.

3° Une couche de pierres plates en calcaire néocomien, formation de la région. Cette couche peut être évaluée à 0m05 environ.

4° Une couche de cendres immédiatement au-dessous de la précédente. Même épaisseur.

5° La couche magdalénienne à silex et ossements, de 0m25.

6° Une deuxième couche de pierres plates d'environ 0m10.

7° Un dépôt d'argile sablonneuse, de 0m05 de puissance.

8° Le rocher ou sol naturel.

L'épaisseur totale de la fouille était donc de 0m70 environ.

Cette constatation d'une couche de pierres plates au-dessus du sol est d'un intérêt majeur. C'est la seule grotte, d'ailleurs, où j'aie pu relever une telle disposition. Nous verrons que dans une grotte sépulcrale (Trèsques), néolithique cette fois, les ossements reposaient sur une couche de pierres plates au-dessus de l'argile, nomme dans la grotte de Jean-Louis : il est curieux de rencontrer chez ces populations paléolithiques puis néolithiques, les mêmes errements. Dans la grotte de Jean-Louis, la raison eu est évidemment un filet d'eau qui, glissant sur l'argile du sol, devait le transformer en un véritable bourbier. Nous avons vu qu'au-dessus de la couche magdalénienne existait un foyer de cendres recouvert à son tour par une autre couche de pierres plates, mais on ne peut rapporter cette dernière couche à l'époque néolithique. À ce moment, la grotte de Jean-Louis n'a pas été habitée et je n'y ai trouvé ni un instrument de type néolithique, ni le moindre fragment de poterie. Il est vraisemblable que cette couche de pierrailles ne remonte qu'à l'époque gallo-romaine.

Les objets qui ont été recueillis à la grotte de Jean-Louis sont en silex profondément cacholonné : ce sont des lames allongées et souvent retouchées, des grattoirs, des racloirs, des burins, etc., qui suffiraient, par leur ensemble morphologique, à classer cette grotte parmi les magdaléniennes. Les ossements de renne viennent confirmer cette impression.

Ce sont d'abord des bois de renne, puis des mâchoires brisées en trois et quatre fragments, pour en extraire la moelle. Ainsi que le fit remarquer M. G. de Mortillet, lorsque je présentai ces pièces, à la Société d'Anthropologie (17 mars 1892), leur mode de cassure est tout spécial. Les Magdaléniens aimaient beaucoup sucer les matières muqueuses qui se trouvaient au-dessous des dents. Pour satisfaire leur goût, ils. cassaient toujours les maxillaires longitudinalement. On trouva aussi des canons de renne brisés dans la même intention, puis des os longs également brisés longitudinalement, et cela comme les canons et os longs trouvés dans la grotte de Soyons, dans l'Ardèche, par le Cte Lepic. Ce sont là encore les vestiges que j'ai trouvés dans la grotte magdalénienne, du Figuier, située en face de la grotte de Chabot, mais de l'autre côté de la rivière d'Ardèche, sur la rive gauche et dans le département de l'Ardèche par conséquent.

Ces grottes se complètent et elles ont été évidemment habitées par la môme population. J'ai fait ressortir le mélange, dans ces deux grottes, de pièces appartenant par leur morphologie aux époques moustérienne et magdalénienne, et si dans la grotte du Figuier, leur niveau respectif apparaissait, en un point du moins, assez distinct, on peut dire, cependant, d'une façon générale, qu'il s'agit d'une môme époque avec survivance de types industriels, et que cette époque est celle de la Madeleine.

Nous avons fait pour la grotte d'Oullins semblable remarque.

L'une des particularités les plus intéressantes de cette grotte, consiste en une série de traits gravés sur les parois et sur la nature desquels il est assez difficile de se prononcer. Je ne saurais mieux faire que de transcrire ici la note que j'avais présentée sur ces gravures à. la Société d'Anthropologie en 1896. Cette communication fut faite à l'occasion de la découverte par M Rivière de dessins gravés en creux sur les parois de la grotte de la Mouthe, dans la Dordogne. M. Rivière y avait reconnu la représentation d'animaux (bœuf et cheval) par des traits repassés on non à l'ocre, puis une série de stries sans signification apparente.

Il existe précisément, disais-je, sur les parois de la grotte Chabot, des gravures analogues. Je connaissais depuis longtemps ces gravures, bien connues aussi, d'ailleurs, des palethnologues de la région, mais, pas plus autrefois qu'aujourd'hui encore, je n'étais fixé sur leur valeur et leur date d'exécution. J'avais bien lu, dans la France préhistorique de M. Cartailhac, que « les parois de certaines grottes (sépulcrales artificielles) portent souvent une multitude de lignes dirigées sans ordre et dans tous les sens; qu'il y a quelquefois des traits réguliers qu'on pourrait considérer comme destinés à rappeler un nombre ou une série de faits ». Mais je ne sais à quelles grottes l'auteur a fait allusion. 

En 1889, M. Chiron, instituteur à Saint-Just-d'Ardèche, adressa à la Société d'Anthropologie de Lyon une note sur ces dessins. Il avait cru y reconnaître un arc tendu, des oiseaux et cinq ou six personnages enchevêtrés. Je n'y avais jamais rien vu de semblable et, en 1891, une délégation de l'Académie de Vaucluse à laquelle appartient notre collègue, M. Nicolas, n'y voyait rien de plus, à son tour, qu'une série de lignes gravées grossièrement, sans esprit de suite et d'assemblage bizarre. Il semble d'ailleurs que M. Chiron ait, dans la suite, jugé autrement des choses, car dans une publication postérieure, il est beaucoup moins explicite.

Ce sont, en somme, des traits gravés en creux, à une profondeur d'environ 0m005, que l'on trouve. Ces traits sont verticaux d'autres les viennent couper obliquement et sous des angles plus ou moins aigus, si bien qu'il en résulte de véritables hachures. En un point existe une étoile et il est étonnant qu'elle n'ait pas été signalée, car c'est réellement la figure la plus décisive. Certains de ces traits dépassent 0m50 de longueur. Il en est qui sont recouverts, comme à la Mouthe, d'une couche de stalactite.

Par qui ont été gravés ces traits curieux, car l'appellation de dessins serait bien prétentieuse?

Est-ce réellement par les hommes qui ont habité coite grotte à l'époque de la Madeleine?

Je ne sais. Tout ce que je puis dire, c'est que cette grotte a été habitée à l'époque magdalénienne, qu'elle ne semble pas l'avoir été pendant toute la période néolithique ; qu'elle l'a été de nouveau à l'époque gallo-romaine, ainsi qu'on témoignent les objets que j'y ai pu recueillir. Ce que je puis dire aussi, c'est qu'il a fallu un temps considérable pour exécuter ces gravures, car la dureté de cette roche néocomienne est extrême. Il est curieux de voir dans deux grottes magdaléniennes des gravures analogues et le rapprochement s'imposait. Je me garde bien de conclure, et ce n'est que comme pierre d'attente que je signale cette intéressante particularité.

Les découvertes récentes de MM. Rivière, Daleau, etc., m'ont engagé à étudier à nouveau. ces traits gravés, et je suis arrivé à penser que leur origine intentionnelle ne saurait être mise en doute.

Outre que ce sont les seuls que l'on trouve dans les nombreuses cavernes préhistoriques des gorges de l'Ardèche, il est impossible de les confondre avec de simples fissures du rocher. Il existe précisément vers le fond de la caverne quelques fissures qui permettent d'établir une comparaison. Dans une fissure, les arêtes sont vives, les deux lèvres sont comme taillées à l'emporte-pièce, et la pénétration dépasse le demi-centimètre qu'atteint à peine un trait gravé de la grotte. Dans ces gravures, les bords du trait ne sont plus à pie; ils sont mousses, comme taillés en dédolant. Ils vont en s'écartant de la partie profonde, comme si le grand angle ainsi formé résultait du passage réitéré d'un instrument épais terminé comme un burin par un angle trièdre, et qui aurait pénétré dans la roche à la façon d'un coin.

Il faut donc arriver à conclure que ces traits, qui nous paraissent informes ou dont nous ne comprenons pas le sens qu'ils ont eu, peut-être, sont bien de la main de l'homme.

 

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